Documents

Les sites culturels du patrimoine mondial sont représentatifs de la créativité et du génie de l’humanité. Le patrimoine mondial appartient à tous, et nous partageons la responsabilité de le protéger ; chaque site incarne l’histoire, les valeurs, les croyances et les compétences des personnes qui l’ont créé. Lorsqu’un site culturel est détruit, cela représente une perte particulièrement dévastatrice pour tous ceux qui perçoivent le site comme un reflet de leur histoire, de leur culture et de leur identité. La destruction délibérée du patrimoine culturel, comme nous en avons récemment été témoins en Iraq, affecte bien plus que des bâtiments ou des sculptures. Il s’agit d’un nettoyage culturel, visant à détruire la dignité des personnes qui considèrent ce patrimoine comme une expression de leur identité.

L’Iraq a actuellement quatre sites inscrits sur la Liste du patrimoine mondial. Ce numéro tente de faire découvrir leur splendeur ainsi que celle d’autres sites qui font partie de la liste indicative du pays et pourraient être inscrits dans l’avenir.

Hatra, site inscrit en 1985, est une grande ville fortifiée ayant résisté à l’invasion desRomains en 116 et 198 apr. J.-C., grâce à sa haute muraille renforcée de tours. En avril 2015, des éléments de ce site datant de 2 000 ans furent délibérément détruits. La cité antique d’Assour (Qal’at Cherqat) a été simultanément inscrite, en 2003, sur la Liste du patrimoine mondial et sur la Liste du patrimoine mondial en péril. Elle remonte au IIIe millénaire av. J.-C., et fut la première capitale de l’Empire assyrien du XIVe au IXe siècle av. J.-C.

En 2007, la Ville archéologique de Samarra a également été inscrite sur les deux listes. Samarra est le site d’une puissante capitale islamique qui régna durant un siècle sur les provinces de l’Empire abbasside s’étendant de la Tunisie jusqu’à l’Asie centrale. La Grande Mosquée, datant du IXe siècle av. J.-C., et son minaret en spirale font partie des nombreux monuments architecturaux remarquables du site, dont 80 % restent à excaver.

La Citadelle d’Erbil, inscrite sur la Liste du patrimoine mondial en 2014, est un ancien village fortifié au sommet d’un imposant tell de forme ovoïde dans la région du Kurdistan iraquien. Le mur continu de façades de maisons donne encore l’impression visuelle d’une forteresse imprenable dominant la ville d’Erbil. Des documents historiques attestent du peuplement très ancien du site – Erbil correspond à l’ancienne Arbela, un important centre politique et religieux assyrien.

Le patrimoine de l’Iraq ne se limite pas à ces sites ayant le statut de patrimoine mondial, ou à ceux qui pourraient le devenir. Il englobe tous ces lieux qui rendent ce pays unique. Et tous sont menacés.

La valeur de ces sites est évidente, et leur perte serait irréparable. Assour, Samarra et Hatra sont situés dans des zones de conflits très volatiles où la destruction, le pillage et le trafic illicite des biens culturels sont devenus une préoccupation croissante, et où la situation évolue chaque jour. Ce numéro de Patrimoine Mondial attire l’attention sur le patrimoine de l’Iraq, parfois méconnu, en soulignant sa valeur et en expliquant les actions entreprises pour sa sauvegarde. Les auteurs de ce numéro, parmi lesquels figurent des responsables iraquiens, des experts internationaux et des spécialistes de l’UNESCO, mettent en évidence les actions en cours pour protéger ce patrimoine, tant pour les citoyens iraquiens que pour le reste du monde.

Kishore Rao

Directeur du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO