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Camp de concentration de Tarrafal

Date de soumission : 07/05/2004
Critères: (ii)(iii)
Catégorie : Culturel
Soumis par :
Ministerio da Cultura e DesportosInstituto da Investigaçao e do patrimonio cultural
Etat, province ou région :
Ile de Santiago
Coordonnées N15 17 W23 46
Ref.: 1907
Avertissement

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Les noms des biens figurent dans la langue dans laquelle les Etats parties les ont soumis.

Description

Le choix d'établir un camp de répression tout à fait au Nord de File répondait à des critères politiques bien précis : réprimer durement les opposants politiques au Gouvernement nouvellement établi de Salazar mais surtout les abattre psychologiquement. Pour le pouvoir portugais, un opposant que l'on savait en vie valait mieux qu'un opposant mort que l'on pourrait ériger en martyre.

Le confinement en milieu insulaire d'individus jugés dangereux pour la société où le pouvoir est une idée vieille comme le monde. Celle-ci cependant avait sa spécificité : elle est née au moment où l'Europe plongeait ses racines dans un fascisme aveugle qui allait plongeait le monde entier dans une nouvelle crise. En même temps que la Gestapo affirmait sa politique de répression, elle formait une Internationale de la Répression en parrainant les Chemises Noires italiennes et les agents de la PIDE portugaise. La politique que tous ces pouvoirs fascistes avaient en commun était d'abattre les nouvelles forces communistes qui ont émergées avec la Révolution Russe de 1917. Les opposants de tous bords à ces régimes fascistes seront taxés de communistes pour les confondre à l'opinion publique encore appréhensive aux idées marxistes-léninistes.

C'est ainsi qu'en Avril 1936 est approuvé le Décret n° 26539 qui crée la Colonie Pénale de Tarrafal de l'île de Santiago de l'archipel des files du Cap-Vert. Il s'agissait au départ d'un périmètre mesurant environ « deux cent pas sur trois cent » entouré par une végétation d'arbustes mais délimité par des fils de fer barbelés soutenus par des poteaux de bois.


Tout juste cinq mois après son approbation, en Septembre 1936, les premiers prisonniers politiques y sont internés. Il s'agit d'un contingent de 155 personnes. Parmi elles, il y a des officiers de la marine qui avaient contestés le pouvoir de Salazar. Les conditions de vie sont extrêmement dures pour ces êtres habitués à la rigueur des pays froids et confrontés subitement à des températures caniculaires tout au long de l'année. La lourdeur des vêtements, la précarité des tentes puis des baraques, l'alimentation inadaptée, les pénibles châtiments infligés étaient autant de pressions exercées aux reclus que pour ceux qui en sortaient vivants et ceux qui en entendaient parler n'aient plus envie de défier le pouvoir de Salazar. Pendant une vingtaine d'années, plusieurs milliers d'opposants au régime de Salazar vont défiler au Camp Pénal de Tarrafal. Parmi ces opposants on pouvait compter certains de nationalités non portugaises, des espagnols et des polonais qui avaient intégrés les filières de lutte antifasciste en Europe.

Avec la déconfiture des pouvoirs fascistes allemand et italien pendant la seconde Guerre Mondiale et les pressions internationales constantes contre le régime de Salazar conduisent à la première fermeture du Camp de Concentration de Tarrafal en 1956 par le Décret-loi n°40675 du 7 Juillet 1956.

Entre-temps, suite aux conséquences de la seconde Guerre Mondiale, les Mouvements de Libération National fleurissaient un peu partout en Afrique et les colonies de tous les pays d'Europe dans le monde entier aspiraient à leur souveraineté nationale. Des après la proclamation de l'indépendance des pays des colonies britanniques puis francophones, les premières violences viennent entacher les rapports entre le Portugal et ses colonies d'Afrique. L'une des premières réponses a cette violence, après l'envoi et le renforcement des forces militaires, la restructuration de la police politique secrète portugaise, la PIDE et son infiltration diffuse dans les colonies, c'est la réouverture du Camp de Concentration. Par l'Arrêté n°18539 de la Direction Générale de la Justice du Ministère Portugais d'Outre-mer publié dans le Bulletin Officiel du Cap-Vert n° 31 du 5 Août 1961, le Gouvernement de la République du Portugal ouvre pour une seconde fois le « Camp de Travaux Forcé » de Tarragona.

Les premiers à y être internés sont d'abord les « activistes » des colonies portugaises, c'est-à-dire des combattants africains contre l'occupation portugaise. Pour ses raisons d'ordres militaires, le camp est réaménagé. Le mode de répression accentué. Des tranchés entourent la cour intérieure du camp surplombé par une muraille de béton armé et de fil de fer barbelé, ce qui lui donne l'impression des systèmes de défense médiévale des forteresses, mais celui-ci introverti, c'est-à-dire situé à l'intérieur. Une chambre de torture, mise sur pied dans les camps nazi, par la Gestapo, y est instaurée. Elle aura pour nom « la poêle » puis plus tard « la petite Hollande ». Ce cynisme dans l'appellation de cet espace tant redouté montre toute la violence physique et morale qu'il fallait infliger aux occupants de ce camp.

Il a fallu attendre la « Révolution des Œillets » pour que ce camp soit fermé à tout jamais. Il est aujourd'hui ouvert de nouveau pour que la mémoire de ceux qui y sont passés ne soit pas à jamais oubliée. Mais surtout que l'espèce humaine, que les générations futures se rappelle toujours cette célèbre phrase de Plaute « Homo homini lupus » (L'homme est un loup pour l'homme).