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L’UNESCO toujours à construire

Dans sa cellule de prison sur Robben Island, Nelson Mandela n’avait que très peu d’opportunités de s’informer sur ce qui se passait dans le reste du monde. Plusieurs années plus tard, en 1996, il confia au Directeur général de l’UNESCO, Federico Mayor, alors en visite dans une Afrique du Sud récemment délivrée de la discrimination raciale, que le Courrier de l’UNESCO avait été sa fenêtre sur le monde. Le Président et ses anciens compagnons de prison s’étaient plu à lire le Courrier, qui l’a sensibilisé à la diversité culturelle et au patrimoine commun de l’humanité, à l’histoire de l’Afrique, ainsi qu’à l’éducation pour le développement, entre autres. Ces nombreux sujets n’avaient pas leur place dans le lexique de l’apartheid, et encore moins dans les cellules de Robben Island, a écrit plus tard Annar Cassam de l’UNESCO, présent lors cette rencontre.

Un autre témoignage personnel nous vient de Mme Vissière, une femme de la Vallée de Marbial (Haïti) qui a appris à lire et à écrire à l’âge de 42 ans en 1948 grâce à l’expérience-témoin d’éducation de base de l’UNESCO. Ce qui suit est son récit personnel au sujet de son alphabétisation :
 
« Quand je suis requise d’apposer ma signature sur une pièce quelconque, inutile de vous dire que je ne me contente plus de tracer une croix, et quand l’occasion se présente de consulter des documents relatifs à mes biens je ne recours point pour les lire à des amis à qui il faudrait peut-être payer un pourboire s’ils ne sont pas satisfaits d’être suppliés. Chez le spéculateur je sais désormais contrôler le poids du café que je vends ; chez le marchand, je ne suis pas non plus gauche pour calculer la monnaie à payer et à recevoir.
 
En vérité avec tous ces horizons ouverts devant moi, je me sens heureuse… »
 
Depuis des générations maintenant, l’UNESCO incarne des aspirations, des espoirs, et une lutte constante pour une vie meilleure, tous basés sur la dignité humaine, la compréhension mutuelle et la solidarité de l’humanité. Ces idéaux et ces valeurs sont formulés dans l’Acte constitutif de l’Organisation, qui constitue la clé pour comprendre l’histoire de l’UNESCO.

La création

L’Acte constitutif a été adopté à Londres le 16 novembre 1945 par les représentants de 44 pays alliés. Ce moment marqua la création de l’UNESCO comme le résultat d’une série de rencontres, les Conférences des ministres alliés de l’éducation (CAME), qui se sont tenues à Londres entre 1942 et 1945. Un an plus tard, le 4 novembre 1946, la nouvelle organisation voyait officiellement le jour avec la vingtième ratification de l’Acte constitutif.

La mission de cette nouvelle organisation était de construire, comme l’avait suggéré Archibald MacLeish, poète américain et chef de la délégation américaine, « les défenses de la paix dans l’esprit des hommes ». Pour faire de cette vision une réalité, l’UNESCO devait travailler à travers l’éducation, la culture et la communication. Le mandat était multifacettes mais le but était le même : la paix.

L'éducation avant tout

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Port au Prince, Haiti

Les premiers travaux de l’UNESCO dans le domaine de l’éducation de base ont eu un impact considérable, comme le montre plus haut le témoignage de Mme Vissière concernant l’expérience-témoin dans la Vallée de Marbial (Haïti). En 1948, l’UNESCO a recommandé aux États membres de rendre obligatoire et universelle l’éducation primaire gratuite. Cette même année, l’éducation a été incluse à la Déclaration universelle des droits de l’homme (article 26). Cependant, plus de 40 ans plus tard, en 1990, la Conférence mondiale sur l’éducation pour tous, qui s’est tenue à Jomtiem (Thaïlande), a estimé nécessaire de lancer un mouvement mondial en faveur d’une éducation de base accessible à tous les enfants, jeunes et adultes. Le Forum mondial sur l’éducation qui s’est tenu à Dakar (Sénégal) en 2000 a constitué l’étape suivante en engageant les États à assurer une éducation de base à tous d’ici 2015.

Le Secrétaire général des Nations Unies a lancé en septembre 2012 l’Initiative mondiale pour l’éducation avant tout, qui vise, sur cinq ans, à accélérer les progrès en faveur des objectifs de l’Éducation pour tous mais aussi du Millénaire pour le développement dans le domaine de l’éducation. L’UNESCO tient le rôle de chef de file pour cette initiative. Selon l’Institut de statistique de l’UNESCO, il y a encore en 2014 plus de 900 millions d’adultes et de jeunes analphabètes dans le monde. Bien que d’importants résultats aient été atteints, beaucoup reste encore à faire.

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UNESCO Executive Board pays tribute to Pakistani school girl Malala Yousafzai

La remise du prix Nobel de la paix 2014 à Malala Yousafzai est en parfaite harmonie avec le mandat de l’UNESCO et les efforts fournis depuis sa création en 1945 pour promouvoir l’éducation et les droits de l’homme. L’UNESCO a exprimé sa solidarité avec Malala à plusieurs reprises ces dernières années. Le Conseil exécutif lui a également rendu hommage le 18 octobre 2012, et la Directrice générale, Irina Bokova, a notamment déclaré : « Chaque fois que dans le monde on interdit à une jeune fille d’entrer à l’école, c’est une attaque contre toutes les filles, contre le droit d'apprendre, contre le droit de vivre pleinement sa vie et c’est inacceptable. »

Les sciences naturelles

Parmi les premiers exemples de projets majeurs de l’UNESCO dans le domaine des sciences naturelles figurent le Programme de la zone aride (1948-1966) ainsi que la préparation et l’organisation de la Décennie hydrologique internationale, lancée à partir du 1 janvier 1965. En décembre 1951, une rencontre intergouvernementale de l’UNESCO a mené à la création de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN) en 1954.

En 1968, l’UNESCO a organisé la première conférence intergouvernementale ayant pour but de concilier environnement et développement, un sujet qui continue d’être abordé dans le domaine du développement durable. Le principal résultat de la conférence de 1968 a été la création du Programme sur l’Homme et la biosphère de l’UNESCO.

Le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a pris l’initiative en octobre 2013 de mettre en place un Conseil consultatif scientifique. Ce nouveau conseil fournit des recommandations sur la science, la technologie et l’innovation pour le développement durable aux agences des Nations Unies. L’UNESCO assure le secrétariat du Conseil.

Les sciences sociales et humaines

Dès le début, l’UNESCO a considéré la promotion de la compréhension internationale comme une condition préalable essentielle pour éviter que les crimes et les tragédies que sont le génocide, le racisme et la guerre ne se répètent. Par conséquent, elle a mis en place un groupe d’experts sur le thème de la race, qui a ensuite abouti aux Déclarations de l’UNESCO sur la race de 1950 et 1951. Ces déclarations contre le racisme, préparées par des scientifiques, ont servi de référence aux militants des droits civiques aux États-Unis au cours de leurs campagnes contre la ségrégation raciale. En 1955, l’Afrique du Sud s’est retirée de l’UNESCO au motif que certaines publications de l’Organisation « interféraient » dans les « problèmes raciaux » du pays. Elle ne réintègrera l’Organisation qu’en 1994, libre, démocratique et sous la présidence de Nelson Mandela.

La Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’homme (adoptée par la Conférence générale de l’UNESCO en 1997 et approuvée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1998) fait également partie des initiatives novatrices et influentes. Elle a prolongé la réflexion sur le concept de dignité humaine aux domaines de la biotechnologie et de la génétique.

La culture

Les premières activités de l’UNESCO dans le domaine de la culture comprenaient la Convention universelle sur le droit d’auteur de 1952, qui visait à protéger la créativité artistique et, de la même manière, promouvoir la diversité des cultures en permettant à ces artistes de vivre décemment.

En 1950, l’UNESCO a lancé le projet Histoire de l’humanité, le premier d’un certain nombre d’activités lié à l’histoire, comprenant également l’Histoire générale de l’Afrique (lancée en 1964). Ces initiatives constituaient des mesures concrètes à la déclaration de l’Acte constitutif de l’UNESCO selon laquelle « l’incompréhension mutuelle des peuples a toujours été à l’origine » des guerres. Les histoires visaient à combattre les stéréotypes et les préjudices, et à promouvoir la compréhension mutuelle. Ce fut également l’objectif du « Projet majeur relatif à l'appréciation mutuelle des valeurs culturelles de l'Orient et de l'Occident » (1957-1966).

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Abu Simbel (Egypt)

Le travail de l’Organisation dans le domaine du patrimoine culturel s’est fait connaître grâce à la Campagne de Nubie, lancée en 1960. Le but de la campagne était de déplacer le Grand Temple d’Abou Simbel et d’éviter son inondation par  le Nil lors de la construction du barrage d’Assouan. Pendant cette campagne qui a duré 20 ans, 22 monuments et complexes architecturaux ont été déplacés. Cette campagne a été la première et la plus grande d’une longue série, telle que la Campagne de Borobudur en Indonésie.

Ce travail a abouti à l’adoption en 1972 de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel. Le Comité du patrimoine mondial a été créé en 1976 et les premiers sites inscrits sur la Liste du patrimoine mondial en 1978. Depuis, des instruments juridiques essentiels relatifs au patrimoine et à la diversité culturels ont été adoptés par les États membres de l’UNESCO en 2003 (Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel) et 2005 (Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles).

L’UNESCO a toujours soutenu l’idée selon laquelle la culture est une composante essentielle du développement. La Conférence mondiale sur les politiques culturelles de 1982 qui a eu lieu dans la ville de Mexico (Mondiacult) et le travail de la Commission mondiale de la culture et du développement (« Notre diversité créatrice », 1996) font partie des étapes importantes de ce processus. L’UNESCO a proposé et préparé l’intégration de la culture dans l’agenda des Nations Unies pour le développement post-2015.

La communication et l'information

Dans le domaine de la communication, la libre circulation de l'information a toujours été une priorité pour l’UNESCO. Au cours des années qui ont immédiatement suivi la Deuxième Guerre mondiale, les efforts se sont concentrés sur la reconstruction et l’identification des besoins de la communication de masse à travers le monde. L’UNESCO a commencé à proposer des formations et enseignements pour journalistes dans les années 1950. En réponse à des demandes en faveur d’un nouvel ordre mondial de l’information et de la communication à la fin des années 1970, l’UNESCO a créé la Commission internationale d’étude des problèmes de la communication, qui a notamment produit le rapport de 1980 intitulé « Voix multiples, un seul monde ». En guise de suivi, l’Organisation a mis en place les programmes Information pour tous et Vers les sociétés du savoir, en préparation du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) en 2003 (Genève) et 2005 (Tunis).

Le SMSI a conduit à la création en 2006 du Forum sur la gouvernance de l’Internet, un espace de dialogue multipartite à travers duquel l’UNESCO promeut l’idée que les mécanismes de gouvernance de l’Internet doivent être fondés sur les principes d’ouverture, de confidentialité et de diversité, englobant l’accès universel, l’interopérabilité, la liberté d’expression et des mesures destinées à résister à toute tentative de censure du contenu.

Le Programme Mémoire du monde a été créé en 1992 dans le but de préserver le patrimoine documentaire en péril. Il a été décrit comme la « mémoire collective des peuples du monde ». Depuis une conférence internationale à Vancouver en 2012, le programme souligne également fortement l’importance d’assurer la préservation et l’accès à long terme de la mémoire numérique du monde.

Le « soft power »

Afin d’atteindre les objectifs énoncés dans son Acte constitutif, l’UNESCO utilise un large éventail d’outils et de rôles, tels que des instruments juridiques, des conférences et des réunions d’experts, des missions et des projets. L’UNESCO a été et continue d’être un acteur de terrain, un laboratoire d’idées, un organisme de développement des capacités et une institution normative.

Parmi ces outils figurent les publications de l’Organisation. Le tout premier ouvrage de l’UNESCO a été publié en 1947 : « L'Éducation de base : Fonds commun de l'Humanité ». Au cours des 25 années suivantes, plus de 5 000 titres sont venus s’ajouter à la collection. En octobre 1960, le New York Times a rédigé une critique très favorable au sujet des publications de l’UNESCO, et a évoqué le fait que – dans le domaine de la publication internationale – « l’UNESCO a atteint un succès jamais égalé par aucun autre éditeur privé : ses auteurs, ses livres et ses périodiques, et, inévitablement, ses idées et ses faits se sont invités dans les esprits des hommes partout dans le monde. » Le « Manuel de l’UNESCO pour l'enseignement des sciences » est un exemple de best-seller international, tiré à plus d’un million d’exemplaires avec différentes éditions.

L’UNESCO est la seule agence de l’ONU à avoir créé des Commissions nationales ainsi que des clubs avec ses États membres comme liens directs avec la société civile. Elle a également créé de nombreuses organisations non-gouvernementales au cours de ces premières années d’existence ; ces ONG ont participé à l’élaboration et à la mise en œuvre de programmes. Une autre initiative, le Système des écoles associées, est entre autres l’un des plus puissants réseaux réunissant enfants, enseignants et citoyens de pays et cultures différents. L’UNESCO a su mettre en place des réseaux dédiés aux scientifiques, aux professionnels, aux militants et à la jeunesse partout dans le monde, même lors de la guerre froide et du processus de décolonisation. La promotion du dialogue entre les cultures et les civilisations a été l’un de ses plus grands défis. En effet, grâce au processus de décolonisation, l’UNESCO est devenue une institution réellement universelle. Entre 1958 et 1964, un total de 27 États africains nouvellement indépendants a rejoint l’Organisation. Par conséquent, elle a par la suite davantage mis l’accent sur le développement et le renforcement des capacités.

L’UNESCO a une influence certaine de par les idées soit qu’elle a créées, soit qu’elle a aidé à développer et à diffuser par-delà les frontières des États membres. Dans le monde d’aujourd’hui, nous assistons aux conséquences concrètes d’idées telles que la liberté d’expression, le patrimoine culturel et naturel universel, la biodiversité (le développement durable), la diversité des expressions culturelles, l’apprentissage tout au long de la vie, le patrimoine immatériel, le rôle des sciences pour la société, et la bioéthique. Des concepts plus généraux de l’UNESCO ont aussi été largement repris et discutés, tels que la Culture de la paix (lancé en 1989 à Yamoussoukro en Côte d’Ivoire) et celui de Nouvel humanisme, proposé en tant que concept global pour l’UNESCO par la Directrice générale en 2009. Ces idées sont toutes des expressions, à différents niveaux, des idéaux, des valeurs et des objectifs de l’Acte constitutif de l’UNESCO. Elles sont plus opportunes et plus pertinentes que jamais.