Promotion de l'alphabétisme en Afghanistan (ELA)
Profil de pays: Afghanistan
Population | 30 552 000 (2013) |
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Langue officielle | Dari, Pashto |
Taux d’alphabétisme des jeunes (15 – 24 ans, 2015, estimation ISU) | Femmes : 46,33% |
Taux d’alphabétisme des adultes (15+ ans, 2015, estimation ISU) | Femmes : 24,15% |
Sources statistiques |
Présentation générale du programme
Titre du programme | Promotion de l'alphabétisme en Afghanistan (ELA) |
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Organisation chargée de la mise en œuvre | Ministère afghan de l'Éducation (Direction de l'alphabétisation) et UNESCO |
Langues d’enseignement | Dari et pashto |
Partenaires de financement | Gouvernement du Japon |
Date de création | 2008-2013 |
Historique et contexte
Même si la Constitution afghane, notamment en ses articles 13, 14 et 44, fait obligation à l'État d'assurer un égal accès à l'éducation de base pour tous les citoyens afin de promouvoir le développement, les efforts dans ce domaine se heurtent à de nombreux défis. En particulier, le pays connaît depuis le début des années 1970 des conflits armés répétés qui ont entravé le développement, exacerbé la pauvreté et entraîné la destruction à grande échelle des infrastructures éducatives, le déplacement de personnes et l'émigration d'éducateurs professionnels. Autant de facteurs qui ont réduit à néant les efforts du gouvernement pour atteindre l'éducation universelle. L'accès à une éducation de base de qualité est également compromis par la faiblesse du financement public de l'éducation, des pratiques socioculturelles enracinées comme le travail des enfants et le mariage précoce et l'opposition acharnée des islamistes ultraconservateurs à l'enseignement laïc.
Ainsi, beaucoup d'Afghans ont été privés de leur droit à l'éducation de base comme le montrent non seulement les faibles taux de scolarisation primaire et secondaire et d'achèvement (voir plus haut), mais aussi les faibles taux d'alphabétisme des jeunes (34,3 pour cent) et des adultes (29 pour cent). La situation est particulièrement difficile pour les ruraux et les femmes, seulement huit pour cent des Afghanes étant alphabétisées selon certaines études. Malheureusement, le manque d'opportunités éducatives, et les taux élevés d'analphabétisme et le manque de perspectives d'emploi qui en résultent pour la majorité des Afghans, ont été identifiés parmi les principales causes de sous-développement et des cercles vicieux de conflit qui affligent le pays depuis le début des années 1970. C'est pourquoi, pour relever ces défis et notamment combattre le fléau de l'analphabétisme et promouvoir le développement durable et la paix dans le pays, le gouvernement afghan et l'UNESCO ont initié le programme de promotion de l'alphabétisme en Afghanistan (ELA) en 2008.
Le programme de promotion de l'alphabétisme en Afghanistan (ELA)
L'ELA est un vaste programme intégré d'alphabétisation et de formation professionnelle lancé en 2008 par le ministère afghan de l'Éducation (ME, à travers la Direction de l'alphabétisation) avec l'appui technique et financier de l'UNESCO et du gouvernement du Japon. Il est actuellement mis en œuvre dans 18 provinces (94 districts au total) dans le cadre du Plan national stratégique pour l'éducation (NESP, 2006–2010), qui vise à réhabiliter et à développer le système éducatif national, et du programme LIFE (Literacy Initiative for Empowerment) de l'UNESCO, qui cherche à améliorer l'alphabétisme et les conditions de vie en Afghanistan. Le programme quinquennal (2008-2013) voulait offrir une alphabétisation de qualité à 600 000 jeunes et adultes (dont 60 pour cent de femmes), mais aussi une formation professionnelle et des opportunités d'activités génératrices de revenus aux participants qui ont achevé avec succès le cours d'alphabétisation. L'ELA cible essentiellement les jeunes et les adultes (15 ans et plus) analphabètes et semi-analphabètes des communautés défavorisées et souvent enclavées, principalement parce qu'ils ont été privés d'opportunités d'éducation de base de façon disproportionnée et constituent, de ce fait, la couche démographique aux taux d'analphabétisme et de pauvreté les plus élevés du pays. De même, le programme cherche à renforcer l'accès des femmes aux opportunités éducatives afin d’encourager leur autonomisation, les Afghanes étant particulièrement défavorisées, avec notamment un taux d'alphabétisme de 13 pour cent seulement.
Comme indiqué plus bas, l'objectif fondamental de l’ELA est non seulement de combattre le fléau de l'analphabétisme parmi les groupes socio-économiques défavorisés, mais aussi de promouvoir le développement durable et la paix en Afghanistan. Dans cette optique, le programme privilégie les principaux domaines d'étude intégrés suivants :
- alphabétisation (de base et fonctionnelle) ;
- formation professionnelle ou activités génératrices de revenus (menuiserie, transformation du coton, couture, tissage, agriculture, élevage, etc.) ;
- compétences de la vie courante ou éducation civique (éducation sanitaire, formation au leadership, droits de l'homme, gouvernance démocratique, gestion et résolution des conflits, éducation au genre).
Buts et objectifs
L'adoption d'un tel curriculum intégré vise essentiellement à adapter le programme aux besoins des apprenants et de leurs communautés afin de les aider à améliorer leurs conditions de vie et à promouvoir le développement et la paix en Afghanistan. Plus particulièrement, l’ELA se donne pour objectifs de :
- améliorer la qualité de l'éducation ;
- combattre le fléau de l'analphabétisme ;
- promouvoir une culture de l'apprentissage ;
- promouvoir l'acquisition de compétences de la vie courante (y compris les activités génératrices de revenus) afin de lutter contre la pauvreté et de favoriser l'autonomisation sociale ;
- promouvoir une culture de l'autonomie ;
- faciliter la préservation du patrimoine culturel et environnemental ;
- soutenir les initiatives de renforcement de la paix en cours ;
- habiliter les Afghans à participer activement à l'œuvre et aux processus de construction nationale.
Au-delà de ces principaux objectifs, l’ELA vise aussi à renforcer les capacités institutionnelles et humaines de la Direction de l'alphabétisation du ministère de l'Éducation en vue de pérenniser l'alphabétisation dans le pays après l'achèvement du programme.
Mise en œuvre du programme : approches et méthodes
Conception de supports d'enseignement-apprentissage
Pour favoriser la mise en œuvre efficace et durable de l’ELA, la Direction de l'alphabétisation a conçu et réalisé, avec l'appui technique de différentes parties prenantes, divers supports d'enseignement-apprentissage à l'intention des participants.
Recrutement et formation des animateurs
Comme indiqué plus haut, le manque aigu d'infrastructures éducatives et d'éducateurs professionnels constitue l'un des principaux obstacles à l'accès à l'éducation de base universelle en Afghanistan. Pour relever ces défis et garantir la mise en œuvre durable et efficace de l’ELA, le ME et l'UNESCO ont ouvert, avec le soutien actif des Conseils de développement communautaire (CDC) locaux, des centres d'alphabétisation communautaire (CLC) et recruté environ 2 000 bénévoles communautaires comme animateurs ou formateurs. Ces bénévoles étant en majorité des sortants du cycle primaire avec aucune ou peu d'expérience des pratiques d'éducation non formelle, le ME et l'UNESCO leur offrent une formation professionnelle initiale et continue ou un encadrement dans divers aspects de l'éducation non formelle :
- alphabétisation et compétences de la vie courante ;
- méthodes d'enseignement et d'apprentissage ;
- tenue d’une classe ;
- conception et réalisation de supports d'enseignement-apprentissage adaptés ;
- analyse et évaluation des résultats d'apprentissage.
Une fois formés, les animateurs sont tenus d'alphabétiser 25 apprenants en moyenne et d'aider les organisations chargées de la mise en œuvre du programme et les CDC à mobiliser et à recruter des apprenants potentiels, à encourager les membres de la communauté à soutenir le programme et à gérer les CLC. Chaque animateur perçoit un salaire mensuel de 88 dollars pour ces services.
Recrutement des apprenants
À l'image des autres programmes d'éducation non formelle, les critères de recrutement des apprenants sont généralement souples et, de ce fait, le niveau d'études des apprenants est rarement pris en compte, le but fondamental du programme étant de créer des opportunités d'apprentissage pour les défavorisés et les analphabètes. Toutefois, les apprenants potentiels doivent généralement :
- être âgés de plus de 15 ans, analphabètes ou semi-analphabètes ;
- être d'origine socio-économique pauvre ;
- avoir envie d’apprendre et d’améliorer son bien-être personnel et celui de sa communauté ;
- avoir le soutien familial pour participer au programme (essentiel en particulier pour les femmes) ;
- être résident permanent du village.
Méthodes et approches d'enseignement-apprentissage
Les apprenants au programme ELA sont tenus de suivre six mois d'alphabétisation de base et trois mois de post-alphabétisation ou d'alphabétisation fonctionnelle. Ceux qui s'illustrent lors de ces étapes d'alphabétisation initiale sont conviés à suivre des cours de formation professionnelle, à l'issue desquels ils bénéficient d'un microcrédit et d'équipements pour initier une activité génératrice de revenus. Dans les deux cas, la formation repose principalement sur des méthodes d'enseignement-apprentissage participatives axées sur l'apprenant, avec discussions thématiques, questions et réponses, jeux de rôles et démonstrations.
Impact et défis du programme
Suivi et évaluation
Le suivi-évaluation permanent de l’ELA est assuré par des professionnels internes (fonctionnaires du ME et de l'UNESCO) et externes en vue de garantir sa mise en œuvre efficace et efficiente. Pour le volet interne, des équipes de professionnels du ME et de l'UNESCO effectuent des visites de terrain mensuelles au cours desquelles ils discutent avec les animateurs, les membres des CDC et le personnel local et provincial pour identifier les forces, faiblesses et bienfaits du programme. Ces visites consultatives servent, par ailleurs, à identifier des mécanismes pour améliorer le programme. D'autre part, les animateurs évaluent les apprenants en permanence à travers une série de tests. De plus, des consultants professionnels externes ont été engagés pour évaluer le programme.
Impact
Les études d'évaluation menées à ce jour indiquent que le programme ELA a contribué de façon positive et durable à la création d'environnements alphabétisés, au développement communautaire, à la réduction de la pauvreté, à l'autonomisation sociale, au renforcement de la paix et à la réhabilitation de communautés déchirées par la guerre. En particulier, l’ELA a induit les principaux bienfaits suivants :
- Amélioration des taux d'alphabétisme : en 2010, le programme a alphabétisé environ 90 000 apprenants pendant neuf mois dans neuf provinces, et environ 3 000 jeunes (15–24 ans) ayant achevé cette première phase avec succès ont suivi une formation professionnelle dans des domaines aussi divers que la menuiserie, la transformation du coton, la couture, le tissage, l'agriculture et l'élevage. Dans les deux cas, le taux d'achèvement est de 94 pour cent. En outre, environ 92 500 apprenants suivent actuellement des cours ELA dans les 18 provinces. En conséquence, le programme a joué (et continue de jouer) un rôle essentiel dans l'amélioration des taux d'alphabétisme en Afghanistan, mais aussi dans l'autonomisation économique des participants.
- Autonomisation des femmes : comme indiqué plus haut, les femmes représentent environ 60 pour cent des participants au programme ELA. De ce fait, il a contribué à les autonomiser non seulement en améliorant leur niveau d'alphabétisme, mais aussi en les aidant à initier des activités génératrices de revenus viables qui leur permettent de contribuer aux revenus familiaux. En outre, l'apprentissage aux côtés de leurs congénères leur a offert de rares opportunités d'interagir avec des personnes étrangères, leur permettant ainsi d'être des membres actifs et influents de leurs communautés comme le montre l'élection de certaines sortantes aux Conseils de développement communautaire (CDC).
- Renforcement de la paix : en alphabétisant les participants, en les dotant de compétences productives et en leur offrant des opportunités d’activités génératrices de revenus, le programme les a non seulement aidés à améliorer leur niveau de vie, mais aussi contribué à promouvoir la paix et la réhabilitation socio-économique des communautés affectées par les conflits. L'accès à des revenus fiables a également renforcé la résilience de la population à l'adversité et son autonomie, tout en réduisant sa vulnérabilité à l'attrait des différents groupes armés. Ainsi, le programme contribue de façon positive à la construction de la nation et au renforcement de la paix.
- Renforcement des capacités : outre les cours d'alphabétisation, une série d'activités de renforcement des capacités est organisée chaque année au profit des alphabétiseurs aux niveaux central, local et communautaire. Ces activités, qui incluent la planification, le suivi et la formation d'enseignants, ont renforcé les capacités de ces institutions à continuer d’alphabétiser les apprenants qui ont achevé le programme.
Défis
Bien que le programme ELA bénéficie de l'appui de l'État, du gouvernement du Japon et de l'UNESCO, sa mise en œuvre complète et efficace a été entravée par une forte opposition de la part des islamistes ultraconservateurs, l’insuffisance de ressources financières, matérielles et humaines, mais aussi par l'insécurité qui règne dans le pays. Sur ce dernier aspect, il a été difficile pour les équipes de professionnels et les animateurs de s'aventurer à l'intérieur des zones rurales, de crainte d'être enlevés et tués par les groupes armés qui s'opposent à « l'imposition » d'une éducation « européenne » à l'Afghanistan. Les participants, en particulier les femmes, ont souvent été la cible des insurgés, qui dissuadent ainsi d'autres personnes de participer au programme. Le manque aigu d'animatrices a entravé la participation des femmes, qui doivent uniquement fréquenter des classes tenues par des éducateurs de même sexe. En outre, les contraintes financières et matérielles ont été exacerbées par l'ampleur et le caractère très ambitieux des interventions d'alphabétisation du programme. Par exemple, il a été souligné qu'il est pratiquement impossible d'alphabétiser 600 000 analphabètes en cinq ans dans un pays aussi pauvre et instable que l'Afghanistan. À la lumière de ces défis, certains analystes avancent que la formation dispensée aux apprenants ne les dote pas efficacement de compétences suffisantes.
Sources
- UNESCO : The pilot programme of enhancement of literacy in Afghanistan
- Communiqué de presse de l'UNESCO : The official agreement on the ELA signed by the Afghan Ministry of Education
- UNESCO : The ELA and Skills development Programme in Afghanistan
Contact
Maryester Gonzalez
Coordonnatrice du programme ELA,
No. 647, Shar-e-Naw, Kabul,
Afghanistan
Téléphone : +93 799 064986
E-mail : Utilisateur: m.gonzalez-rojas
[AT_HOST]: (at) unesco.org
Site web : http://www.unesco.org/kabul