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« L’héritage laissé par les survivants : Se souvenir des persécutions nazies des Roms et des Sinti : un instrument essentiel dans la lutte contre le racisme d’aujourd’hui », par Andrzej Mirga

Le 17 janvier 1945, la libération du camp de concentration d’Auschwitz a permis de sauver 7.000 prisonniers, qui avaient réussi à survivre à la torture, à la famine, aux maladies, aux expériences médicales, aux exécutions et aux chambres à gaz. Aucun Rom ni Sinti ne figurait parmi ces survivants. Six mois avant la libération, la nuit du 2 août 1944, les 2.897 Roms, femmes, vieillards et enfants du camp nommé « Zigeunerlager », ou camp de gitans, établi par un décret de Himmler de décembre 1942, qui avaient déjà subi alors toutes les atrocités possibles, ont péri dans les chambres à gaz. Environ 23.000 Roms et Sinti en tout ont été détenus à Auschwitz ; 13.000 d’entre eux originaires d’Allemagne et d’Autriche, les autres venant de pays soumis au Troisième Reich, ou collaborant avec lui. Entre avril et juillet 1944, environ 3.500 Roms et Sinti ont été transférés vers d’autres camps. Certains d’entre eux ont survécu aux épreuves de la persécution, mais 85 % de ceux qui ont été transportés au départ à Auschwitz Birkenau ont fini par être exterminés.

Pendant des décennies, les Roms et Sinti qui avaient survécu aux persécutions nazies ont gardé le silence et ils ont rarement raconté leurs histoires ou rapporté ce qu’ils avaient vécu et observé.  Du fait que la commémoration dépend des souvenirs des personnes, des témoignages des survivants, de la recherche et de l’historiographie, de la reconnaissance officielle, les souffrances des Roms et des Sinti ont très peu attiré l’attention. Après 1945, de nombreux pays, n’ont ni reconnu ni condamné leurs persécutions raciales, et ils ont en outre continué leurs pratiques discriminatoires à l’égard des Roms et des Sinti, y compris dans le processus de restitution (Informations sur la compensation aux victimes Roms des persécutions nazies Lien externePDF).

Les Roms et les Sinti ont luté pour être reconnus et occuper la place qui est la leur parmi les victimes du régime nazi. Ce n’est qu’au début des années 1980, que l’Allemagne a reconnu officiellement que l’extermination des Roms et des Sinti était fondée sur des raisons raciales. Ce n’est qu’en 1984 que les Roms et les Sinti eux-mêmes ont commencé à commémorer leur génocide à Auschwitz le 2 août, date de la liquidation du camp « Zigeunerlager », avec la participation des représentants de l’État et de la communauté internationale. Ce n’est qu’en 2001, que le musée national d’Auschwitz a ouvert une exposition permanente sur le génocide des Roms et des Sinti.

Des personnalités symboliques et leurs histoires, telles celle d’Anne Franck, qui incarnent l’expérience vécue dans la Shoah, restent dans le souvenir pour des générations. Les Roms et les Sinti n’ont toujours pas découvert une telle preuve personnelle, symbolisant les persécutions endurées. L’histoire d’« Unku » ou Erna Lauenburger, une jeune Sinti allemande, pourrait faire partie de ces histoires éloquentes, symbolisant le génocide des Roms et des Sintis. Erna, qui a servi de modèle à l’héroïne éponyme du livre pour enfants « Ede et Uku », par Grete Weiskopf-Bernheim (pseudonyme de Alex Wedding) est née en 1920. Le livre a été publié en 1931. L’auteur était juive et son livre a donc été banni par les nazis en 1933. Erna a été enregistrée pour sa race en 1939 et a été classée « gitane de race mixte » en 1941. Elle a été déportée depuis le camp de détention de Magdeburg directement vers Auschwitz, le 1er mars 1943, avec sa famille et elle est morte là-bas la même année. Sur les onze enfants Sinti mentionnés dans ce livre, basé sur des histoires vraies, seul un enfant a survécu à la persécution.

Le souvenir de la Shoah ne peut disparaître parce que les souffrances de millions d’êtres ne doivent pas avoir été vaines. Pourtant, l’humanité est confrontée à plusieurs reprises au mal que représente le génocide. Est-il possible de l’éviter ? Les survivants nous apprennent à ne pas collaborer avec ceux qui épousent la haine, mais plutôt de leur résister et de s’opposer à eux activement.

Les idéologies racistes n’ont pas disparu de notre monde ; il existe toujours des groupes sociaux qui sont prêts à prêcher ce genre d’idées et à s’en inspirer dans leurs actes. Ceux qui ont souffert pendant l’ère nazie, notamment les Roms et les Sinti, ne peuvent oublier que les idéologies racistes ont été la cause profonde de leur persécution à l’époque, et que c’est aussi pourquoi ils se sentent particulièrement menacés de nos jours par des groupes extrémistes ou néonazis. Ces groupes, qui se trouvent sans nul doute en marge de la société, n’ont pas peur de se montrer en public et de louer l’idéologie nazie, de rappeler ses symboles et ses slogans et d’organiser rassemblements et marches pour célébrer le passé nazi. Il est triste qu’ils continuent de faire des adeptes.
Le souvenir de la Shoah est essentiel dans la lutte contre le racisme et l’intolérance de nos jours. Il implique un engagement reconnaissant la valeur de l’être humain, sa dignité et ses droits. Le souvenir ne suffit pas ; il doit être suivi de lois qui protègent la dignité et les droits des êtres humains. Cette logique a présidé à la Déclaration universelle des droits de l’homme et elle permet d’assurer les principes d’égalité et de non discrimination dans les législations et constitutions fondamentales. De la même manière, il faut appliquer efficacement les outils servant à faire respecter les lois pour prévenir ou punir les manifestations violentes d’idéologies extrémistes et racistes.
L’OSCE, conjointement à d’autres organisations internationales, reconnaissant le danger des discours haineux, du racisme agressif, de la xénophobie et de l’antisémitisme, a appelé maintes fois au renforcement des actions visant à promouvoir la tolérance et la non discrimination. De telles actions doivent notamment viser les jeunes générations « afin de leur faire comprendre la nécessité d’être tolérant et l’importance de la réconciliation et de la coexistence pacifique ».

L’autre héritage qu’ont laissé les survivants concerne l’enseignement de la Shoah. Il est obligatoire, mais il présente aussi des difficultés, surtout quand 65 ans se sont écoulés depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale. Il nécessite la participation d’instituts spécialisés pour mettre au point des programmes d’enseignement et les faire passer dans les institutions. Nous vivons dans un monde nouveau, qui offre de nouveaux outils pour conserver le souvenir, apprendre et enseigner le passé. À cet égard, le fait que plus de 47 millions de personnes aient visité le musée d’Auschwitz depuis sa création et qu’un million de visiteurs viennent le voir chaque année, constitue un signe d’espoir. En ce qui concerne les survivants des Roms et des Sinti, leurs récits de la persécution sous le régime nazi, devraient devenir une partie légitime des principaux récits et enseignements sur la Shoah et servir de rappel universel de ce qui ne devrait jamais se produire une nouvelle fois.  

Questions pour la discussion :

Les documents de réflexion fournissent un forum de discussion pour les spécialistes de l’Holocauste et de la lutte contre les génocides, afin de soulever des questions qui nourrissent le débat et la recherche. Il a été demandé à ces auteurs, provenant de cultures et de contextes très variés, de rédiger des articles basés sur leurs points de vue et expériences personnels.Les opinions exprimées par ces spécialistes ne reflètent pas nécessairement celles des Nations Unies.

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