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« L'enseignement de l'Holocauste en Russie aujourd'hui : défis et réalisations », par Ilya Altman, fondateur et coprésident du Centre russe de recherche et d'éducation sur l'Holocauste

En Russie, l'enseignement de l'Holocauste a commencé dans les années 1990, à l'initiative de passionnés. À l'époque, le Gouvernement russe avait commencé à déclassifier les documents d'archives et à les rendre disponibles au grand public. De 1991 à 1994, le gouvernement a lancé une initiative pilote de sensibilisation du public incluant des expositions internationales comme la Maison Anne Frank (Pays-Bas), qui ont été organisées à Moscou et dans d'autres villes. À l'heure actuelle, en Russie, deux organisations non gouvernementales, le Centre russe de recherche et d'éducation sur l'Holocauste (fondé en juin 1992) et la Fondation pour l'Holocauste (créée en 1997), ont joué un rôle de premier plan dans l'organisation de l'enseignement de l'Holocauste. Plus récemment, le Musée de l'héritage juif et de l'Holocauste, grâce à une subvention du Congrès juif de Russie, a lancé certains projets éducatifs intéressants, notamment la formation d'enseignants de l'école du dimanche de l'Église baptiste évangélique.

L'un des principaux objectifs du Centre consiste à organiser l'enseignement de l'histoire de l'Holocauste dans les écoles et les universités juives de Russie. En 1999, le Centre a travaillé avec les membres du personnel de l'Académie russe de l'éducation, le principal centre de méthodologie pédagogique du pays, pour élaborer un programme scolaire et dresser des lignes directrices pour l'enseignement de l'histoire de l'Holocauste. Le Centre a publié un guide de l'enseignant intitulé History of the Holocaust in the Occupied Territory of the Soviet Union (Histoire de l'Holocauste dans les territoires occupés de l'Union soviétique), écrit trois années plus tôt (1996) par Galina Klokova, une citoyenne russe ayant joué un rôle particulièrement important dans l'enseignement de l'Holocauste.

Comme la Russie ne disposait d'aucun programme gouvernemental pour l'enseignement, il était important de mettre au point les outils pédagogiques nécessaires et de mettre les éducateurs en contact avec les experts internationaux dans le domaine par le biais de séminaires pédagogiques. Pour parvenir à ses fins, le Centre a uni ses efforts à ceux de la Fondation pour l'Holocauste de 2007 à 2011 pour organiser six conférences internationales sous le thème Lessons of the Holocaust and Contemporary Russia (Les leçons tirées de l'Holocauste et la Russie d'aujourd'hui) et plusieurs séminaires régionaux dans le cadre du Forum de l'histoire vivante.   Des enseignants suédois et des membres du personnel du Centre et de la Fondation pour l'Holocauste ont été invités à prendre la parole durant ces événements. En outre, la documentation parallèle de ces conférences a été publiée et mise à la disposition des enseignants. On estime que des dizaines de milliers d'enseignants ont été rejoints grâce à ces initiatives.

Les cours internationaux de formation des enseignants du Centre et la Fondation pour l'Holocauste ont joué le rôle de plate-forme collective pour l'étude des méthodes d'enseignement de l'Holocauste. Les cours donnés ont été préparés conjointement avec l'Institut d'éducation ouverte de Moscou, l'organisme gouvernemental qui supervise la certification des enseignants de Moscou et leur recertification obligatoire aux cinq ans. Depuis 2010, ces cours ont été donnés sous les auspices de la Federal Academy of Advanced Training and Professional Retraining for Educators.

Yad Vashem, l'Institut commémoratif des martyrs et des héros de l'Holocauste, a également été un partenaire indispensable dans le domaine de l'enseignement de l'Holocauste. Depuis 2000, l'école a organisé des cours d'été pour 40 à 50 enseignants. Parmi ce nombre, 25 sont envoyés chaque année en Israël pour participer à des séminaires. À ce jour, plus de 250 éducateurs de la Russie ont reçu une formation à Jérusalem et sont devenus des représentants régionaux du Centre dans les établissements de perfectionnement professionnel et les universités pédagogiques. Ces établissements forment les enseignants en matière d'Holocauste et elles participent en outre à des échanges internationaux en Europe et aux États-Unis. Plus de 100 enseignants ont participé à ces programmes. Ils ont visité la Maison de la Conférence de Wannsee, en Allemagne, le Mémorial de la Shoah, en France, et divers musées consacrés à l'Holocauste aux États-Unis. Malheureusement, tous ces voyages ont été financés par le Centre et ses partenaires étrangers et non pas par le gouvernement.

En 2003, l'inclusion de l'Holocauste dans une version provisoire de la Russian Standard of History Education (Norme russe en matière d'enseignement de l'histoire) a été un tournant pour l'enseignement de l'Holocauste dans le pays. Bien que cette norme n'ait pas encore été pleinement intégrée dans le processus pédagogique, elle a fait de l'enseignement de l'Holocauste un sujet obligatoire dans les manuels scolaires. Jusqu'à maintenant, quelque 20 rédacteurs de manuels scolaires ont rédigé un chapitre portant sur l'Holocauste. En 2010, la prestigieuse maison d'édition « Russkoe Slove » a réuni ces divers chapitres sur l'Holocauste dans une publication intitulée The Subject of the Holocaust in School Textbooks (Le sujet de l'Holocauste dans les manuels scolaires). On y trouve également des recommandations adressées aux enseignants sur la façon d'utiliser les textes dans leurs leçons. En 2011, le Centre a réussi à inclure des questions sur l'Holocauste dans l'Unified State Examination (examen d'État unifié), ce qui équivaut à la reconnaissance de l'importance du sujet par le Ministère de l'éducation et des sciences de la Fédération de Russie.

Aujourd'hui, les institutions gouvernementales de perfectionnement des éducateurs organisent régulièrement des conférences et des séminaires sous le thème de l'Holocauste pour les professeurs d'histoire et d'études sociales dans l'ensemble du pays. L'Institut d'éducation ouverte de Moscou offre des conférences sur l'Holocauste dans le cadre de son programme de perfectionnement. En 2010, le Centre, de concert avec la Federal Academy of Advanced Training and Professional Retraining for Educators (établissement fédéral de formation avancée et de perfectionnement des enseignants), a mis au point un module didactique unifié sur l'Holocauste, conformément à la recommandation formulée par le Ministère de l'éducation et des sciences à ses bureaux locaux.

Dans les écoles où l'Holocauste n'est pas enseigné (en tout, seulement six leçons sont consacrées à l'histoire de la Seconde Guerre mondiale dans les écoles secondaires russes), les travaux parascolaires et les devoirs sont devenus essentiels. Un grand nombre d'enseignants offrent des cours optionnels qui incluent des discussions en soirée avec des témoins et des survivants de l'Holocauste, de même que le visionnement de films suivi de périodes de discussion. Ces dernières années, les enfants qui ont étudié l'Holocauste sont devenus plus actifs dans la préservation du souvenir de cet événement. Ils ont participé à des activités comme les entrevues avec des témoins et à l'entretien des monuments à la mémoire de l'Holocauste.

Pendant les 12 dernières années, le Centre et la Fondation pour l'Holocauste ont organisé un concours international intitulé Memory of the Holocaust – the Path to Tolerance (La mémoire de l'Holocauste – La voie de la tolérance), et le nombre d'étudiants et d'enseignants russes inscrits a augmenté d'année en année. En 2001, 2 000 étudiants de presque toutes les régions de la Russie ont participé au concours. Cette progression de la participation était en partie due à une campagne d'information menée par le Ministère de l'éducation et des sciences en 2010 et 2011. Le concours est une excellente façon d'évaluer les paramètres qualitatifs et quantitatifs de l'enseignement de l'Holocauste en Russie.

Les candidatures les plus intéressantes du concours portaient sur des projets s'inspirant de documents de l'histoire locale. Ces candidatures incluaient des essais, des contes, des poèmes, des dessins, des scripts et des films documentaires créés à partir d'archives historiques orales, de documents provenant d'archives personnelles et d'études sociologiques.

Les prix sont présentés aux gagnants le 27 janvier, date de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, en collaboration avec le Centre d'information des Nations Unies à Moscou. Depuis 2004, les étudiants gagnants ont également présenté leurs projets à l'UNESCO, à Paris. Les projets gagnants ont également été publiés dans huit volumes spéciaux intitulés We Cannot be Silent: Schoolchildren and Students on the Holocaust (Nous ne pouvons rester silencieux : Écoliers et étudiants qui parlent de l'Holocauste).

De 2001 à 2005, le Gouvernement fédéral a mené un programme national visant à promouvoir la tolérance et intitulé Tolerance Awareness and Prevention of Extremism in Russian Society (La sensibilisation à la tolérance et la prévention de l'extrémisme dans la société russe). Le programme ne mentionnait pas l'Holocauste, mais le sujet était largement traité dans les séminaires destinés aux éducateurs, de même que dans les outils pédagogiques conçus pour l'occasion. L'un des premiers outils pédagogiques publiés dans le cadre de ce programme était un manuel intitulé History of the Holocaust and Jewish Resistance in the Occupied Territory of the Soviet Union (Histoire de l'Holocauste et de la résistance juive dans les territoires occupés de l'Union soviétique), par Ilya Altman.

En 2002, 25 000 exemplaires du manuel intitulé History of the Holocaust in the Soviet Union (Histoire de l'Holocauste en Union soviétique), dont les auteurs sont Ilya Altman, Alla Gerber et David Poltorak, ont été imprimés avec l'agrément officiel du Ministère de l'éducation. En 2003, l'ouvrage a été traduit en allemand en Autriche. Le Centre a publié des plans de cours et des outils pédagogiques destinés aux professeurs de littérature russe. Le Centre a également publié une liste d'activités parascolaires sur divers sujets relatifs à l'Holocauste comme la Journée internationale à la mémoire des victimes de l'holocauste (2009), Babi Yar (2006), la Nuit de cristal (2008) et les Justes parmi les Nations (2005, 2011).

Ainsi, les expériences intéressantes se sont multipliées en Russie dans le domaine de l'enseignement de l'Holocauste dans le contexte de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. Un certain nombre de ces programmes d'enseignement ont été soutenus par des subventions provenant d'organismes internationaux comme le Conseil de l'Europe, la Conference on Jewish Material Claims Against Germany, le Groupe de coopération internationale pour la recherche sur l'Holocauste, l'enseignement de ses réalités et la perpétuation de sa mémoire, de même que par des commanditaires locaux. Depuis 2008, les programmes d'enseignement du Centre ont été financés chaque année par le biais d'une subvention versée par le Président de la Russie d'un montant de 70 000 à 80 000 $. Malheureusement, la formation des enseignants et la participation des établissements publics d'enseignement aux projets d'enseignement de l'Holocauste ont été perturbées par le fait que la Russie n'est pas membre du « Groupe de coopération » et par l'absence d'un programme gouvernemental officiel d'enseignement de l'Holocauste dans le pays.

La coopération internationale, notamment en ce qui concerne le partage de données d'expérience dans le domaine de la culture de la mémoire associée aux événements de la Seconde Guerre mondiale, demeure un outil important de sensibilisation de la communauté éducative à l'importance de l'Holocauste. Il est révélateur que l'inclusion du thème de l'Holocauste dans l'Examen d'État unifié ait été annoncée dans le cadre d'une réunion des Ministres de l'éducation russe et israélien.

Il est mutuellement bénéfique de réunir les enseignants russes et les responsables des établissements d'enseignements d'autres pays. Cet échange permet de familiariser les enseignants russes avec la façon dont leurs homologues gardent vivant le souvenir des victimes de l'Holocauste. Il permet également à leurs homologues d'apprendre comment les Russes s'y prennent pour préserver le souvenir des victimes et des héros de la Grande Guerre patriotique. Ce partage d'idées et de méthodes contribue à la promotion de la notion de l'universalité de l'Holocauste.

De nouvelles perspectives d'enseignement de l'Holocauste en Russie ont été ouvertes par un nouveau cours intitulé Principles of World Religions (Principes des religions du monde), qui consacre énormément d'attention au judaïsme et à l'histoire et à la culture du peuple juif. D'autres sujets comme The Righteous and Righteousness (les justes et la vertu (dans le contexte du titre Les justes parmi les Nations attribué par Yad Vashem) permettent de diffuser des renseignements sur l'Holocauste grâce à des récits sur la vie de sauveteurs héroïques. À cet égard, la dernière parution de la série de la Bibliothèque russe de l'Holocauste, Justes parmi les Nations. Les justes de la Russie : 1941-1945 (Moscou : Ruskoe Slovo, 2011) a suscité un grand intérêt parmi les éducateurs et le grand public. La préparation d'outils pédagogiques multimédias et leur diffusion dans les séminaires régionaux pour les enseignants aiderait à intéresser plus d'étudiants et d'enseignants à la question de l'Holocauste.

La formation de futurs éducateurs et de jeunes chercheurs est de la plus haute importance en Russie. À l'initiative du professeur Efim Pivovar, président de l'Université d'État des sciences humaines de Russie, un nouveau cours universitaire intitulé Histoire de l'Holocauste a été introduit à l'université et il a été proposé d'inviter des enseignants de différentes régions de Russie à participer à un cours de perfectionnement professionnel sur ce sujet.

En 2011, de nombreux articles sur l'enseignement de l'Holocauste ont été publiés dans un certain nombre de publications pédagogiques russes de premier plan, y compris Enseignement de l'histoire à l'école. Les articles ont été écrits non seulement par des universitaires éminents comme le professeur Evgenii Vyazemskii, mais aussi par de jeunes éducateurs provenant de régions éloignées de la Russie comme Elena Petrova, une jeune professeure d'histoire de Polyarnye Zori, dans la région de Murmansk.

En 2012, un nouveau Musée de la tolérance, créé par la Fédération des communautés juives de Russie et s'inspirant de musées semblables situés à Los Angeles et à New York, ouvrira ses portes à Moscou. Le Musée du patrimoine juif et de l'Holocauste de Poklonnaya Gora a également proposé le recours aux technologies de pointe dans sa propre collection. Une initiative de la section russe du projet de la maison d'Anne Frank (Pays-Bas), qui aura pour but de former de jeunes guides pour l'exposition Anne Frank : Leçons d'histoire, sera également lancé en 2012. Les projets pilotes de Moscou et Saint-Pétersbourg sont la preuve d'un intérêt croissant pour le sujet. Ces dernières années, le Centre a accordé une attention spéciale à la « pédagogie muséologique », en mettant l'accent sur la création d'expositions ou d'expositions partielles sur le sujet de l'Holocauste dans les musées régionaux d'histoire locale.

Le terme « Holocauste » s'inscrit plus dynamiquement dans la conscience de la société russe grâce à la large participation du public aux événements commémoratifs de l'Holocauste, y compris la Journée internationale à la mémoire des victimes de l'holocauste, dans de nombreuses villes partout en Russie. Cependant, on observe également certaines tendances inquiétantes. À Rostov-sur-le-Don, pour la première fois de l'histoire postsoviétique récente, une plaque commémorative en l'honneur des 20 Juifs locaux massacrés pendant l'Holocauste a récemment été enlevée et remplacée par une autre plaque faisant référence à la « perte de citoyens soviétiques pacifiques ». Cet événement a soulevé un tollé de protestations de la part des citoyens, de la communauté universitaire et des principales organisations juives du pays, tout en faisant les grands titres des médias et des journaux internationaux, y compris le New York Times 1 et le Jerusalem Post 2.

La plus récente initiative du Centre et du Congrès juif de Russie, connue sous le nom de « Relais de la mémoire », a pour but d'amener les enseignants et les étudiants, dans un cadre parascolaire, à rechercher les noms des victimes de l'Holocauste et des sauveteurs et à conserver les importants artsefacts comme les lettres, les journaux intimes et les photos dans les écoles et les musées.

La conscience de l'histoire de l'Holocauste en tant que partie intégrante de l'histoire de notre pays est l'une des plus importantes avenues pour la création d'une culture du souvenir permettant de contrer toute manifestation d'antisémitisme, de racisme et de xénophobie en Russie.

Notes de bas de page

1. Russie : Protestation par un groupe juif sur la question du mémorial, le New York Times Lien externe EN, article publié le 24 janvier 2012.

2. "Revisionism not remorse" Lien externe EN, par Alex Ryvchin, le Jerusalem Post. Article publié le 2 février 2012

Questions pour la discussion :

Les documents de réflexion fournissent un forum de discussion pour les spécialistes de l’Holocauste et de la lutte contre les génocides, afin de soulever des questions qui nourrissent le débat et la recherche. Il a été demandé à ces auteurs, provenant de cultures et de contextes très variés, de rédiger des articles basés sur leurs points de vue et expériences personnels.Les opinions exprimées par ces spécialistes ne reflètent pas nécessairement celles des Nations Unies.

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