Environnement et développement dans les régions côtières et les petites îles |
Dossiers régions côtières et petites îles 2
RÉSUMÉ DES COMMUNICATIONS DE SCÉANCES PLÉNIÈRES
Les zones côtières dHaïti : juridiction et aspects juridiques La mer, le droit et lenvironnement
PAR JEAN ANDRÉ VICTOR
Lexposé a porté sur les questions juridiques relatives aux ressources côtières, y compris leurs usages public et privé (pêche, navigation, rejet des déchets, exploitation du fond marin, etc.), ainsi que sur les définitions juridiques des mers territoriales (12 milles marins) : droit de souveraineté, droit de passage innocent ; ZEE (jusquà la limite des 200 milles) : droit dexploitation exclusive des ressources ; et la haute mer (au-delà des 200 milles). La législation dHaïti demande à être améliorée, surtout en ce qui concerne la ratification des conventions internationales et le respect de leurs dispositions. Pour des raisons de politique intérieure, entre 1958 et 1972, aucune convention na été signée. Il existe des lois dordre général régissant divers domaines (navigation, pêche) mais leur mise en vigueur est, le plus souvent, négligée. Des conventions ont cependant été récemment ratifiées : cest le cas de la Convention sur la diversité biologique et de la Convention-cadre sur les changements climatiques, ainsi que de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS). Celles qui nont pas encore été ratifiées sont notamment : la Convention de Carthagène (sur la protection et la mise en valeur de lenvironnement marin de la Grande Caraïbe), MARPOL (Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires), la Convention de Bâle sur linterdiction des mouvements et des rejets transfrontaliers de déchets dangereux, et la Convention sur le commerce international des espèces de la faune et de la flore sauvages menacées dextinction (CITES).
Il ne semble pas que Haïti ait des opinions bien définies quant aux conventions parrainées par lOrganisation maritime internationale sur la prévention de la pollution (SOLAS, COLREG, CLC, fonds OPC et OPRC). Les principaux services nationaux compétents en matière de gestion des ressources de la zone côtière sont : les ministères de lenvironnement, de lagriculture, du plan, des finances, du commerce, de léducation et le bureau du secrétaire dÉtat au tourisme. Il existe de nombreux parcs marins dans toutes les Caraïbes, mais aucun à Haïti.
Les méthodes traditionnelles, mode de vie des pêcheurs dHaïti Photo M. Steyaert |
Les régions côtières d'Haïti : Environnement culturel et naturel
PAR JEAN W. WIENER
Les ressources côtières sont probablement, de tout le pays, celles qui sont les plus exploitées et les plus mal gérées. Les problèmes posés par la pêche intensive, la pollution, la pauvreté, les déchets (les décharges), lignorance des lois, le manque déducation, la surexploitation et la négligence généralisées sont évoqués. Le fait que, jusquici , les tentatives de redressement sont restées infructueuses est signalé. Toute activité sexerçant à terre finit par avoir des répercussions sur les eaux côtières ; près des zones fortement peuplées ces eaux sont sérieusement affectées, tandis que dautres bassins plus éloignés sont encore en bon état, quoique légèrement contaminés par la pollution provenant des agglomérations et de lérosion. La surexploitation des pêches dans les eaux littorales est généralisée et aggravée par le fait que la plupart des artisans-pêcheurs ne sont pas équipés pour pêcher les espèces pélagiques.
Les hôtels et les habitations introduisent dans le milieu proche du rivage des déchets domestiques, mais le plus grave problème est, de loin, labsence de traitement des eaux usées dans les grandes agglomérations. Le rejet des huiles de moteur est également très préoccupant. Le déboisement pour la fabrication de charbon et les besoins de la construction ainsi que les pratiques culturales inappropriées sont les principales causes du processus dérosion. Les ressources côtières sont sérieusement surexploitées. Mais comment peut-on les protéger, sachant quelles représentent souvent le seul moyen de subsistance dune famille ? Il est donc nécessaire dimaginer des mesures alternatives, en particulier de protection, de réglementation et déducation.
Le charbon de bois, une source
majeure dénergie de la population. Fabriqué à partir de forêts en voie de disparition, il est stocké au bord des routes et vendu dans les marchés. Photos M. Steyaert |
Gestion des écosystèmes côtiers et coopération bi-latérale
PAR JOSE A. OTTENWALDER
La République dominicaine et Haïti (qui se partagent lîle dHispaniola) jouissent dun pat rimoine marin exceptionnel et inestimable. On y trouve certains estuaires parmi les plus grands et les plus productifs des Caraïbes, tels que lembouchure des fleuves Barracota et Yuna dans la baie de Samaná, lArtibonite et lEstère dans le golfe de la Gonâve et le Yaque du Nord sur la côte atlantique, près de la frontière nord des deux pays. Lîle est au coeur de larc antillais, et dans les eaux territoriales des deux pays se situe un important corridor du trafic maritime de gros tonnage qui traverse la région. Les récifs coralliens, les herbiers de phanérogames et les mangroves dHispaniola comptent parmi les plus beaux des Antilles. De tout temps, le bien-être social et économique des deux pays a été étroitement lié à la santé de leurs régions côtières. La vie urbaine et les activités agricoles se sont concentrées sur les plaines côtières. Les habitations dominicaines et haïtiennes se retrouvent, pour 70 % dentre elles (abritant au minimum 10 000 personnes), dans les régions côtières ; il en va de même pour la majeure partie des activités industrielles.
En République dominicaine, le tourisme, presque entièrement concentré dans la zone côtière, est devenu la première source de revenus du pays. La pêche en mer revêt toujours une importance capitale pour lalimentation locale et lexportation. Ces richesses sont encore sous-estimées et lon commence seulement à entrevoir, dans les milieux officiels et le secteur public, le potentiel que représentent les zones côtières et marines pour le développement durable des deux pays.
La longueur considérable de la côte, très découpée, dHispaniola (3059 km) égale presque celle de Cuba (3 200 km), la plus vaste des îles caraïbes. La concentration dans la zone de presque toutes les activités économiques a de sérieuses répercussions sur les écosystèmes côtiers et marins. Les états voisins et dautres, plus éloignés dans la région, connaissent le même genre de problèmes, qui se traduisent par la dégradation des côtes et la diminution ou lépuisement des stocks de poissons. Ils y répondent par des politiques côtières tendant à faire passer les pêcheries du régime de libre accès à celui dune gestion restrictive et tendant à adopter des dispositions dordre environnemental telles que les plans doccupation des sols et le zonage comme moyens déviter les conflits et laccumulation des effets indésirables.
Une bonne gestion des côtes suppose une réflexion et non pas seulement des techniques pour résoudre les dilemmes. Lidée directrice est de mettre en place une stratégie fondée sur les écosystèmes, nadmettant quune perspective à long terme. Cette façon de voir exige une conception nouvelle de la prise de décisions en concertation entre la République dominicaine et Haïti, à la lumière de leurs effets prévisibles sur les générations à venir. Gérer les écosystèmes implique de considérer la population comme lun des éléments de ces écosystèmes, interconnecté aux processus de fonctionnement et dévolution. La nature ne connaît pas de frontières politiques. Étant donné la relation évidente qui existe entre les écosystèmes dominicains et haïtiens, si lon veut préserver les ressources côtières de lîle, il est indispensable que les deux pays collaborent en agissant comme une seule entreprise conjointe. Les défis et les réalités auxquels les deux pays sont confrontés dans leurs efforts pour atteindre ces objectifs sont développés de façon un peu plus détaillée dans lannexe 2 du présent rapport.
1 535 km de côtes : un océan, un golfe, une mer et un remarquable potentiel
PAR FLORENCE SERGILE
La biodiversité des écosystèmes dHaïti place lîle parmi les premiers de la région. La gamme des habitats comprend les cactus, les forêts humides et les coraux. Laccroissement du taux de population humaine sest accompagné des problèmes habituels, avec la dégradation des habitats des espèces. Les problèmes sont aggravés par la pauvreté des terres agricoles, lescarpement des pentes et létroitesse de la plateforme. Rares sont les plans daménagement à Haïti : il faudrait faire un effort pour en préparer, dans les ministères de lagriculture ou de lenvironnement. Ces dernières décennies, les déchets industriels se sont déversés sur des sols déjà entraînés vers locéan par le ruissellement. Il faut que les ressources dHaïti soient gérées, mais en prenant en compte les considérations socio-économiques et la singularité du pays. Les habitats doivent être protégés et réhabilités. On a proposé de créer une réserve de la biosphère qui couvrirait lîle de la Gonâve ainsi que plusieurs autres zones ayant une flore et une faune typiques. Ces zones devraient correspondre à des régions à vocation diversifiée, y compris la pêche. Haïti se trouve à un moment crucial pour la gestion de ses écosystèmes. Une législation protectrice mieux adaptée et plus étendue est aujourdhui nécessaire. La participation locale est aussi un facteur important.
Haïti et les îles voisines. (Adaptation de lAtlas côtier). |
PAR GISELLE HYVERT AND LOÏC MÉNANTEAU
Le projet (HAI/95/010) "Route 2004" a pour objectif daider à préserver et à perpétuer létat des sites dintérêt naturel, historique et culturel dHaïti, à commencer par la région de Fort-Liberté, au nord-est (en raison de sa biodiversité et de la richesse des sites archéologiques et historiques). Patronné par le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD), le projet porte sur la durabilité des ressources locales, particulièrement dans loptique du développement du tourisme culturel.
Giselle Hyvert rappelle les grandes lignes du projet et les travaux accomplis par léquipe internationale et multidisciplinaire dans la partie nord-est dHaïti (collecte de données sur la géomorphologie, lhydrologie, la faune, la pêche, lagriculture, la destruction des mangroves et sur larchéologie, lhistoire et la vie culturelle et sociale de la région de Fort-Liberté). Elle lance un appel pour ladoption dun cadre juridique plus contraignant visant à obtenir : 1) la création dun Conservatoire du littoral chargé de gérer et de protéger les zones dintérêt historique, culturel et naturel, 2) une réserve de biosphère (MAB) et 3) une réglementation spécifique visant la protection du patrimoine sous-marin. À son avis, le patrimoine culturel ne peut être dissocié du milieu naturel.
Loïc Ménanteau explique la manière dont les données provenant de sources très diverses (depuis les archives, les descriptions des premiers voyageurs, les cartes anciennes, les photographies aériennes, jusquà limagerie satellitaire Landsat TM et SPOT) ont toutes présenté un intérêt inestimable pour aider à retrouver la trace des anciens traits de côte et donc localiser les sites archéologiques dans les zones où ils ont connu un changement considérable depuis 500 ans. Les connaissances acquises sur lévolution du paysage grâce à cette méthodologie ont également servi à déterminer les zones où lon pouvait autoriser la mise en oeuvre de grands projets (urbains, industriels, touristiques etc.) et celles que lon devait protéger à tout prix. Analysées et triées, ces conclusions sont récapitulées sur la carte physiographique, incluse dans latlas côtier publié dans le cadre du projet. Accordant un intérêt égal à la terre et à la mer, la carte physiographique permet, tant aux autorités quaux promoteurs, de mieux prendre leurs responsabilités à légard du développement durable.
La région de Luly : population et économie
PAR MICHAÈLE SAINT NATUS
Les gens du village de pêcheurs de Luly sont généralement mieux organisés que ceux des autres villages haïtiens de même taille ou plus grands. Plusieurs projets dingénierie ont été entrepris par la communauté, tels que le pavage de la principale voie daccès et la canalisation de leau potable. Une quinzaine de résidences secondaires, de bon standing, ont été construites dans les environs tandis que certaines parcelles ont fréquemment fait lobjet de disputes. Un projet de reboisement a été entrepris en 1987-1988 dans la région de Cadine. Quelque 200 000 plants ont été mis en place avec un taux de survie de 87%. Les données sur les pêches sont cependant sporadiques et ne portent pas sur de longues durées malgré lexistence dune coopérative locale de pêche et de plusieurs entreprises commerciales. Le plus grand marché pour Luly est Port-au-Prince. Les pêcheurs voudraient avoir des congélateurs et des réfrigérateurs pour y conserver leurs prises avant de pouvoir les vendre. Le rendement de la pêche est estimé à environ 5 à 10 kg par jour et par pêcheur, et la consommation à 3,6 kg par personne. Bien que lon pratique un peu dagriculture, la plupart des gens exercent la double activité de fermiers-pêcheurs, en fonction des saisons et des capacités individuelles. Des immigrants dautres zones aussi éloignées que Les Cayes se sont installés à Luly. La zone offre quelques possibilités de tourisme, notamment aux îles Arcadins. On cultive essentiellement la pastèque, le citron et la banane, mais on fait très peu délevage. La vente de coraux et de coquillages représente une activité marginale.
À Haïti la pêche, l'une des
bases alimentaires d'une population en croissance
constante, est limitée par 1) l'épuisement des stocks
des eaux côtières peu profondes et 2) le manque de
moyens pour un travail en eaux profonds. À gauche : villageois de Luly avec leur
matériel traditionnel. À droite : un pêcheur de Jacmel
montre sa prise. |
Gestion des côtes en République dominicaine
PAR FRANCISCO GERALDES
De tout temps la côte a été soumise à une très forte pression pour la pêche et les autres activités, mais aujourdhui il faut compter aussi avec les répercussions éventuelles du tourisme. Depuis les années 1990, des scientifiques dominicains ont commencé à faire connaître dans la presse les problèmes de lenvironnement, ce qui a provoqué un changement dopinions et dattitudes du gouvernement et du public. La marine militaire dominicaine sest vue attribuer un très grand rôle dans la gestion des côtes, ce qui a permis de créer le "Bataillon vert", la marine étant chargée de faire respecter les règlements à la mer concernant les côtes, et larmée, des affaires concernant exclusivement la terre. Ces deux unités militaires ont dû être formées à leurs nouvelles tâches. Du fait que les troupes reçoivent déjà leur solde, ce mode de gestion de lenvironnement ne coûte rien. Les universités ont, pour leur part, engagé des recherches afin : 1) détablir un réseau de sites dobservation (CARICOMP, projet sur la productivité des côtes caraïbes, coparrainé par la Fondation MacArthur et dautes organismes des États-Unis, ainsi que par lUNESCO.) : 2) deffectuer un inventaire des collectes sur un site à Montecristi (Fonds mondial pour lenvironnement) : 3) de conseiller le ministère des affaires étrangères pour ce qui est de la ratification des traités. La Fundación MAMMA et ses partenaires ont contribué à la protection de lenvironnement côtier, notamment par le biais du Parque Nacional del Este et du Parque Submarino La Caleta. La République dominicaine a connu la plupart des problèmes qui affectent aussi Haïti en matière de ressources côtières, y compris leur surexploitation, la pollution et divers autres effets anthropiques, mais elle souffre peut-être davantage des effets du tourisme.
Gestion de la zone côtière à la Jamaïque
PAR PETER ESPEUT
La Fondation pour la protection de la côte sud est chargée de la gestion intégrée des côtes et en particulier de la zone de Portland Bight (à louest de Kingston). Dotée de diverses ressources importantes, cette zone abrite de nombreux villages de pêcheurs. De toutes les régions anglophones des Caraïbes, cest celle où les pêcheries sont le plus surexploitées. Les pêcheurs sont donc contraints daller de plus en plus loin et dutiliser de plus grands moyens. Certains récifs sont endommagés par la dynamite, de vastes herbiers de phanérogames sont dégradés par les sennes et les chaluts. La turbidité a augmenté et les tortues sont soumises à une chasse intensive. Les principaux utilisateurs des ressources (pêcheurs, agriculteurs et forestiers) sont le plus souvent pauvres et analphabètes. Chez eux, savoir-faire, cohésion communautaire et sensibilisation à lenvironnement sont rudimentaires. Tout le monde dispose du libre accès aux ressources de la région. Une politique de cogestion entre le gouvernement et la population est suivie. En réalité, le gouvernement na pas les moyens financiers et techniques de gérer ces ressources. Des groupements se sont formés pour améliorer la cohésion communautaire. Il existe deux associations dont lune, vieille de 50 ans, ne sadresse quà des hommes âgés. On en a donc créé une autre (dans les mêmes circonstances quà Luly). Les pêcheurs président les réunions, recueillent les cotisations et demandent au gouvernement un bail pour lutilisation de telle ou telle plage. Le conseil de gestion local compte 15 pêcheurs, deux pêcheurs-plaisanciers, un cabinet de promoteurs immobiliers, les autorités portuaires, deux coopératives jamaïcaines, la police, les garde-côtes et lAgence nationale de protection des ressources. Les pêcheurs locaux sont invités à dénoncer ceux qui ne respectent pas les règlements.
Divers moyens de lutte contre les abus de la pêche sont utilisés, tels que : 1) lélimination des méthodes destructrices, 2) laugmentation de la dimension des filets et la fixation de dimensions minimales de leurs mailles, 3) la création dune zone réservée à lélevage des poissons juvéniles, 4) la limitation du nombre de licences accordées, par le système de licences dit "de grands-pères", consistant à naccorder aucune nouvelle licence et à en accorder une seule au prorata du départ de trois pêcheurs.
Productivité de la zone côtière des Caraïbes
PAR JEREMY WOODLEY
Il faudrait que Haïti dispose dune connaissance plus approfondie de ses ressources côtières et marines, de létat actuel de la productivité et de la biodiversité, et des effets des activités humaines passées et présentes. Il faut cartographier les habitats, les décrire, analyser leur état et créer des systèmes dobservation continue dans des endroits-clés. Participer à CARICOMP est très facile, il suffit de sengager à effectuer des opérations de surveillance et à transmettre les résultats au Centre de gestion des données de la Jamaïque. Linstitution collectant les données est libre den faire lusage quelle désire. Les responsables du projet peuvent aider les nouveaux membres à acquérir lappareillage-type dobservation et, par le réseau, à communiquer avec les autres organismes de recherche marine des Caraïbes. CARICOMP est appelé à devenir bientôt pour les Caraïbes le maillon dun Réseau mondial dobservation des récifs coralliens (Coparrainé par la COI de lUNESCO, lUICN et le PNUE.). Il sera ainsi possible de surveiller, à léchelle de chaque pays, lévolution des récifs coralliens et des systèmes associés, dune façon moins intensive, à un rythme moins exigent que celui du projet. Dautres pays des Caraïbes connaissent les mêmes besoins mais rares sont ceux qui ont pu commencer à les résoudre. Haïti ne dispose pas dun organisme de recherche marine bien équipé, et possède peu de scientifiques dans ce domaine. Ceux-ci seraient heureux de voir se développer leurs contacts et leur collaboration avec des collègues de pays voisins. CARICOMP est un projet régional regroupant des organismes de sciences de la mer des Caraïbes, destiné dune part à évaluer la productivité des mangroves, des phanérogames et des récifs coralliens et dautre part à préciser dans quelle mesure elle est influencée par les activités menées à terre. Il a porté, dans un premier temps, sur les habitats peu perturbés afin de mettre en évidence les conditions de base qui serviront à mesurer également le changement global. La participation dHaïti serait bénéfique tant pour le pays que pour le projet lui-même.
Les sites de surveillance de
CARICOMP. Les flèches indiquent les courants dominants ( daprès M.J. Shulman et E. Birmingham). |
Étude et réduction de lérosion et de la sédimentation dans les bassins versants et sur la côte
PAR ROBERT CASSAGNOL
Le dépôt de sédiments sur la plate-forme continentale dépend de la bathymétrie locale et des courants. Les sédiments se déposent essentiellement tout près du rivage mais les particules les plus fines vont plus loin. La sédimentation est, dans lensemble, un phénomène naturel, sauf lorsquelle est due au déboisement. La côte dHaïti souffre, sur presque toute son étendue, dune certain sédimentation. On ignore, localement, les répercussions du déboisement sur les ressources marines. Il faut expliquer linterdépendance des ressources. En plusieurs régions, le débit des rivières a augmenté ainsi que leur charge sédimentaire. Daprès les données datant du temps de la colonisation, on sait que les ressources étaient utilisées dune façon différente. Lhistoire dHaïti se présenterait ainsi, pour ce qui est de lagriculture et de lindustrie forestière : des années 1700 à 1750 : production de sucre ; de 1750 à 1800 : production de café (avec dévastation systématique des plaines et des forêts) ; de 1800 à 1850 : rétablissement de léquilibre avec lagriculture locale, au début de la période de lindépendance nationale ; de 1850 à 1900 : abattage des arbres à bois dur ; de 1900 à nos jours : la pression démographique provoque la surexploitation des arbres pour la fabrication de charbon de bois et la construction.
Sédimentation des côtes par les
alluvions apportées par les cours d'eau et le
ruissellement des bassins versants, auquel s'ajoute une
charge due à l'irrigation. On estime que la majeure
partie de la charge sédimentaire provient de l'érosion
des sols résultant du déboisement en amont des
rivières. Photos M. Steyaert |
PAR YVELT CHERY
Il est toujours difficile dévaluer la quantité des eaux souterraines ; on peut y employer toute une gamme de techniques exploitant les données géologiques, géomorphologiques ou géophysiques. Les premières données datent de 1924 et les données ultérieures ne sont que sporadiques. Un inventaire des ressources en eau douce dHaïti a été effectué récemment : on dispose de données pour six régions. Les plaines côtières fournissent plus de la moitié des ressources en eau du pays, du fait de leur facilité daccès. Certaines sont fortement surexploitées et contaminées par des infiltrations deau salée. La plupart des nappes phréatiques sont sousexploitées. Aucune mesure de protection des ressources en eau na été prise. En 1974, une loi a été adoptée, les plaçant sous la responsabilité du ministère de lagriculture, mais plusieurs autres organismes ont aussi des compétences en matière dexploitation et de protection de leau, ce qui a occasionné de graves différends. Les informations sur les ressources en eau sont abondantes, mais rien na été publié après 1991. Le ministère de lagriculture a un réseau de pluviomètres et de modèles informatiques mis en place en 1989 mais qui, malheureusement, nest pas exploité.
Stabilité des côtes et des plages aux Caraïbes
PAR GILLIAN CAMBERS
Le projet COSALC (projet sur la stabilité des côtes et des plages dans les petites Antilles, coparrainé par lUNESCO et le Sea Grant College Program de lUniversité de Porto Rico, Mayagüez.), qui sera peut-être un jour étendu aux Grandes Antilles, a pour objectif daméliorer les capacités de chaque nation à mesurer, évaluer et gérer les ressources des plages dans la perspective dune gestion intégrée des côtes. Préoccupés par lérosion des plages et de ses effets éventuels sur le tourisme, des représentants des petites îles de la région avaient fait, en 1982, une démarche auprès de lUNESCO. Des missions dévaluation et des ateliers avaient permis de préciser les besoins de chaque pays et la nature des problèmes. En coopération avec les services nationaux, les ONG, les associations locales et les écoles, des programmes dobservation ont été mis en place dans chacune des îles pour constater la nature et la gravité des changements. Les données recueillies sont actuellement exploitées pour ladoption de mesures correctives, préventives et éducatives. Certaines plages de sable ont reculé de plus de 20 m sous leffet des ouragans et, en dépit de quelques améliorations, la plupart des plages nont pas retrouvé leur état antérieur. La dégradation des récifs coralliens et leur mort , ainsi que lélévation du niveau de la mer, sont peut-être en train daggraver lérosion des côtes.
PAR SABRINA SANDERSON
Rares sont les informations sur lhydrologie dHaïti et la dynamique des eaux territoriales du pays. Les variations de température dans le golfe de la Gonâve sont de lordre de 1 à 5°C et la salinité varie très peu. La pluviométrie en Haïti est denviron 1 300 mm et les précipitations ont lieu essentiellement en mai. Les alizés (dune vitesse de 4 à 8 m/s) soufflent généralement du nord-est de décembre à mai. Les brises côtières modifient les schémas de la circulation générale, notamment dans le Canal du Vent. La circulation peut être affectée par les facteurs suivants : 1) les ouragans (ceux, par exemple, de 1963, 1964, 1966 et 1980) ; 2) la bathymétrie : deux crêtes salignent de part et dautre de lîle de la Gonâve et y entravent la circulation ; 3) lhydrographie : possibilités de remontées deaux froides. La marée semble se déplacer du nord au sud à une vitesse denviron 0,2 m/s, alors que dans le reste des Caraïbes, la moyenne est de 0,5 m/s. On ignore sil existe des données marégraphiques ou anémométriques pour aucune localité dHaïti. Lintervenant signale que lhydrographie de la baie est telle que leau et la pollution ont tendance à stationner. Il faut donc se préoccuper des sources terrestres de la pollution.
Map # 26AHA26181: golfe de la
Gonâve, 20th Edition (27 May
1995); Defense Mapping Agency, Hydrographic and Topographic Agency, USA |
PAR ALEXANDRE DE LARYSSA
Lenvironnement côtier dHaïti connaît certaines difficultés dues à ses industries et au tourisme, sans quaucun organisme gouvernemental nen soit officiellement responsable. Toutes les informations sur les côtes devraient être placées dans un Centre dépositaire. Il faudrait définir avec précision ce quest la région côtière. Laspect esthétique de la côte nest pas pris en considération. Un organisme chargé de gérer les côtes devrait être créé sous légide du ministère de lenvironnement.