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Recommandation concernant la protection sur le plan national du patrimoine culturel et naturel

16 novembre 1972



UNESDOC - (PDF) Anglais - Français - Espagnol - Russe - Arabe
La Conférence générale de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, réunie à Paris, du 17 octobre au 21 novembre 1972, en sa dix-septième session,

Considérant que, dans une société dont les conditions de vie se transforment avec une vitesse accélérée, il est fondamental pour l'équilibre de l'homme et son épanouissement de lui conserver un cadre de vie à sa dimension où il reste en contact avec la nature et les témoignages de civilisation laissés par les générations passées et qu'il convient, à cette fin, d'assigner aux biens du patrimoine culturel et naturel, une fonction active dans la vie collective et d'intégrer les réalisations de notre temps et les valeurs du passé ainsi que les beautés naturelles dans une politique d'ensemble,

Considérant que cette intégration à la vie sociale et économique doit être l'un des aspects fondamentaux de l'aménagement du territoire et de la planification nationale à tous les échelons,

Considérant que des dangers particulièrement graves nés de phénomènes nouveaux inhérents à notre époque menacent le patrimoine culturel et naturel, qui constitue un élément essentiel du patrimoine de l'humanité et une source d'enrichissement et de développement harmonieux pour la civilisation présente et future,

Considérant que chaque, bien du patrimoine culturel et naturel est unique et que la disparition de l'un d'eux constitue une perte définitive et un appauvrissement irréversible de ce patrimoine,

Considérant que chaque pays sur le territoire duquel se trouvent situés des biens du patrimoine culturel et naturel a l'obligation de sauvegarder cette partie du patrimoine de l'humanité et d'en assurer la transmission aux générations futures,

Considérant que l'étude, la connaissance, la protection du patrimoine culturel et naturel dans les différents pays du monde favorisent la compréhension mutuelle entre les peuples,

Considérant que le patrimoine culturel et naturel constitue un tout harmonieux dont les éléments sont indissociables,

Considérant qu'une politique pensée et formulée en commun pour la protection du patrimoine culturel et naturel est susceptible de créer une interaction permanente entre les États membres et d'avoir un effet décisif sur les activités entreprises par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture dans ce domaine,

Notant que la Conférence générale a déjà adopté des instruments internationaux pour la protection du patrimoine culturel et naturel, tels que la Recommandation défroissant les principes internationaux à appliquer en matière de fouilles archéologiques (1956), la Recommandation concernant la sauvegarde de la beauté et du caractère des paysages et des sites (1962) et la Recommandation concernant la préservation des biens culturels mis en péril par des travaux publics ou privés (1968),

Désirant compléter et étendre la portée des normes et principes formulés dans de telles recommandations,

Étant saisie de propositions concernant la protection du patrimoine culturel et naturel, question qui constitue le point 23 de l'ordre du jour de la session,

Après avoir décidé, lors de sa seizième session, que cette question ferait l'objet d'une réglementation internationale par voie d'une recommandation aux États membres,

Adopte ce seizième jour de novembre 1972, la présente Recommandation.


I. Définitions du patrimoine culturel et naturel

1. Aux fins de la présente Recommandation sont considérés comme « patrimoine culturel » :

Les monuments : oeuvres architecturales, de sculpture ou de peinture monumentales, y compris les grottes et les inscriptions, ainsi que les éléments, groupes d'éléments ou structures de valeur spéciale du point de vue archéologique, historique, artistique ou scientifique;

Les ensembles : groupes de constructions isolées ou réunies qui, en raison de leur architecture, de leur unité, ou de leur intégration dans le paysage, ont une valeur spéciale du point de vue de l'histoire, de l'art, ou de la science;

Les sites : zones topographiques, oeuvres conjuguées de l'homme et de la nature qui ont une valeur spéciale en raison de leur beauté ou de leur intérêt du point de vue archéologique, historique, ethnologique ou anthropologique.

2. Aux fins de la présente Recommandation sont considérés comme « patrimoine naturel » :

Les monuments naturels constitués par des formations physiques et biologiques ou par des groupes de telles formations, qui ont une valeur spéciale du point de vue esthétique ou scientifique;

Les formations géologiques et physiographiques et les zones strictement délimitées constituant l'habitat d'espèces animale et végétale précieuses ou menacées, qui ont une valeur spéciale du point de vue de la science ou de la conservation;

Les sites naturels ou les zones naturelles strictement délimitées qui ont une valeur spéciale du point de vue de la science, de la conservation, de la beauté naturelle, ou des oeuvres conjuguées de l'homme et de la nature.

II. Politique nationale

3. Chaque État devrait formuler, développer et appliquer, dans la mesure du possible et en conformité avec sa réglementation constitutionnelle et sa législation, une politique nationale dont l'objectif principal consiste à coordonner et à utiliser toutes les possibilités scientifiques, techniques, culturelles et autres en vue d'assurer une protection, une conservation et une mise en valeur efficaces de son patrimoine culturel et naturel.

III. Principes généraux

4. Le patrimoine culturel et naturel constitue une richesse dont la protection, la conservation et la mise en valeur imposent aux États, sur le territoire desquels il est situé, des responsabilités à l'égard tant de leurs ressortissants que de la communauté internationale tout entière; les États membres devraient prendre les mesures nécessaires pour faire face à ces responsabilités.

5. Le patrimoine culturel ou naturel devrait être considéré dans sa globalité comme un tout homogène qui comprend, non seulement les oeuvres représentant une valeur de grande importance, mais encore les éléments les plus modestes ayant acquis avec le temps une valeur de culture ou de nature.

6. Aucune de ces oeuvres et aucun de ces éléments ne devraient, en général, être dissociés de leur environnement.

7. La protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel ayant comme finalité l'épanouissement de l'homme, une nouvelle orientation devrait, dans la mesure du possible, être donnée par les États membres à leur action dans ce domaine, afin que le patrimoine culturel et naturel n'apparaisse plus comme un frein au développement national mais comme un facteur déterminant de ce développement.

8. La protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel devraient être envisagées comme l'un des aspects fondamentaux de l'aménagement du territoire et de la planification, au niveau national, régional ou local.

9. Une politique active de conservation et d'intégration du patrimoine culturel et naturel dans la vie collective devrait être développée. Les États membres devraient mettre en oeuvre une action concertée de tous les services publics et privés intéressés en vue de la formulation de cette politique et de son application. Les mesures de caractère préventif et correctif concernant le patrimoine culturel et naturel devraient être complétées par d'autres tendant à donner à chaque bien de ce patrimoine une fonction qui l'insère dans la vie sociale, économique, scientifique et culturelle présente et future de la nation, fonction compatible avec le caractère culturel et naturel du bien considéré. L'action menée en vue de protéger le patrimoine culturel et naturel devrait pouvoir bénéficier des progrès scientifiques et techniques de toutes les disciplines impliquées dans la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel ou naturel.

10. Des moyens financiers de plus en plus importants devraient, autant que possible, être affectés, au titre de la participation des pouvoirs publics, à la sauvegarde et à la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel.

11. Les populations locales devraient être associées directement aux mesures de protection et de conservation à prendre et il devrait être fait appel à elles, en vue d'obtenir des suggestions et une aide, notamment en ce qui concerne le respect et la surveillance du patrimoine culturel et naturel. Un concours financier du secteur privé pourrait également être envisagé.

IV. Organisation des services

12. Bien que la diversité ne permette pas à tous les États membres l'adoption d'une organisation uniforme, certains critères communs devraient néanmoins être retenus.

Services publics spécialisés

13. Les États membres devraient instituer sur leur territoire, compte tenu des conditions appropriées à chaque pays et dans la mesure on ils n'existent pas déjà, un ou plusieurs services publics spécialisés chargés d'assurer de manière efficace les fonctions énumérées ci-dessous :

a. Élaborer et mettre en oeuvre les mesures de toute nature ayant pour objet la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel et son intégration dans la vie collective, et en tout premier lieu élaborer un inventaire de protection de ce patrimoine et établir des services de documentation appropriés;

b. Former et recruter le personnel scientifique, technique et administratif chargé d'élaborer les programmes d'identification, de protection, de conservation et d'intégration et d'en diriger l'exécution;

c. Organiser une étroite coopération entre les différentes disciplines au sein des collèges chargés d'étudier les problèmes de conservation technique du patrimoine culturel et naturel;

d. Créer ou disposer des laboratoires et effectuer des études sur le terrain portant sur tous les problèmes scientifiques que pose la conservation du patrimoine culturel et naturel;

e. Veiller à ce que les propriétaires ou ayants droit effectuent les restaurations nécessaires et assurent l'entretien des immeubles dans les meilleures conditions artistiques et techniques.

Organismes consultatifs

14. Les services spécialisés devraient être assistés par des organismes consultatifs chargés de donner des avis sur l'élaboration de mesures concernant le patrimoine culturel et naturel. Ces organismes consultatifs devraient comprendre notamment des experts, des représentants des grandes associations de défense du patrimoine culturel et naturel et des représentants des administrations intéressées.

Coopération entre les organismes

15. Les services spécialisés dans la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel devraient accomplir leurs tâches en liaison et sur un pied d'égalité avec les autres services publics, notamment ceux qui sont chargés de l'aménagement du territoire, des grands travaux d'équipement, de l'environnement, de la planification économique et sociale. Les programmes de développement touristique impliquant le patrimoine culturel et naturel ne devraient pas porter atteinte au caractère et à l'importance de ces biens. Des mesures devraient également être prises, de façon à établir une liaison appropriée entre les autorités intéressées.

16. Une collaboration permanente à tous les échelons devrait être organisée entre les services spécialisés s'occupant des projets importants, et des dispositions de coordination devraient être prises à cet effet afin que les décisions concertées tiennent compte des divers intérêts en présence. Dès la conception des études, des dispositions devraient être prévues conjointement afin d'établir une procédure permettant de résoudre les différends.

Compétence des organismes centraux, fédéraux, régionaux ou locaux

17. Compte tenu du fait que les problèmes de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel et naturel sont délicats, qu'ils impliquent des connaissances spéciales, des choix parfois difficiles et que les personnels spécialisés en ce domaine n'existent pas en nombre suffisant, la répartition des tâches entre autorités centrales ou fédérales et autorités régionales ou locales devrait se faire selon un équilibre judicieux et adapté à la situation de chaque État, pour tout ce qui concerne l'élaboration et la mise en oeuvre de toutes les mesures de protection.

V. Mesures de protection

18. Les États membres devraient dans la mesure du possible prendre les mesures scientifiques, techniques, administratives, juridiques et financières nécessaires pour assurer la protection du patrimoine culturel et naturel situé sur leur territoire. Ces mesures seraient déterminées conformément à la législation et à l'organisation de l'État.

Mesures scientifiques et techniques

19. Les États membres devraient entretenir avec soin et régularité leur patrimoine culturel et naturel afin d'éviter d'avoir recours aux opérations onéreuses imposées par sa dégradation; ils devraient prescrire, à cet effet, une surveillance régulière des biens de ce patrimoine effectuée par des inspections périodiques. Ils devraient en outre établir un programme minutieusement planifié de conservation et de mise en valeur, qui englobera progressivement la totalité du patrimoine culturel et naturel en fonction des possibilités scientifiques, techniques et financières dont ils disposent.

20. Selon leur importance, les travaux indispensables devraient être précédés et accompagnés d'études approfondies. Ces études devraient être réalisées en coopération avec ou par tous les spécialistes intéressés.

21. Les États membres devraient rechercher des méthodes efficaces en vue de renforcer la protection des biens du patrimoine culturel et naturel menacés par des dangers d'une exceptionnelle gravité. Ces méthodes devraient tenir compte de l'interdépendance des problèmes scientifiques, techniques et artistiques qui se posent et permettre de déterminer les mesures à prendre.

22. En outre, ces biens du patrimoine culturel et naturel devraient être rendus à la fonction qui était antérieurement la leur ou être affectés à une fonction mieux appropriée, à condition que leur valeur culturelle n'en soit pas appauvrie.

23. Les interventions à appliquer au patrimoine culturel devraient avoir pour objectif de lui conserver son aspect traditionnel, de le préserver de toute construction nouvelle ou de tout aménagement qui pourrait altérer les rapports de volumes ou de couleurs qu'il a avec son entourage.

24. Les liens que le temps et les hommes ont établis entre un monument et son voisinage sont d'une importance capitale et, en règle générale, ils ne devraient pas être troublés ou détruits. L'isolement d'un monument par la suppression de son voisinage ne devrait pas être en général autorisé; de même son déplacement ne devrait être envisagé que comme une solution exceptionnelle justifiée par des raisons impérieuses.

25. Les États membres devraient prendre des mesures pour protéger leur patrimoine culturel et naturel contre les répercussions défavorables que peut provoquer le développement technologique de notre civilisation. Ces mesures devraient avoir pour objet de lutter contre les secousses et les vibrations des machines et des moyens de transport. Elles devraient en outre comporter des dispositions contre les pollutions, les fléaux naturels et les calamités et des dispositions tendant à la réparation des dommages subis par le patrimoine culturel et naturel.

26. La réanimation des ensembles n'obéissant pas à des règles toujours identiques, les États membres devraient prévoir dans chaque cas approprié une enquête de sciences sociales, afin de déterminer avec précision les besoins socio-culturels ressentis par le milieu dans lequel se trouve l'ensemble à réanimer. Toute opération de réanimation devrait spécialement avoir pour objectif de permettre à l'homme de pouvoir travailler dans cet ensemble, s'y développer et s'y épanouir.

27. Les Etats membres devraient procéder à des études et à des recherches sur la géologie et l'écologie des divers biens du patrimoine naturel, tels que les parcs naturels, les réserves de faune et de flore, les refuges, les zones de loisirs ou autres réserves analogues, afin d'en comprendre la valeur scientifique, de déterminer les conséquences de l'admission du public, et d'en surveiller les implications et pour éviter que le patrimoine ne soit gravement endommagé et assurer une base suffisante à la conservation de la faune et de la flore.

28. Les États membres devraient suivre les progrès des transports; des communications, des techniques audio-visuelles, du traitement automatique de l'information et autres techniques appropriées, ainsi que les tendances de la vie culturelle et des loisirs, afin que les meilleurs moyens et services puissent être mis à la disposition de l'étude, de la recherche scientifique et du public, selon la vocation de chaque zone, sans détérioration des ressources naturelles.

Mesures administratives

29. Chaque État membre devrait dresser aussitôt que possible un inventaire de protection de son patrimoine culturel et naturel y compris des biens qui, sans être d'une importance exceptionnelle, sont inséparables du milieu au caractère duquel ils contribuent.

30. Les résultats des travaux de recensement du patrimoine culturel et naturel devraient être regroupés d'une manière appropriée et régulièrement mis à jour.

31. Pour assurer l'intégration active du patrimoine culturel et naturel à tous les niveaux de la planification, les États membres devraient préparer des cartes ainsi qu'une documentation aussi complète que possible comportant la mention des biens culturels et naturels considérés.

32. Les États membres devraient se préoccuper d'attribuer une fonction appropriée aux ensembles historiques qui ont perdu leur vocation originelle.

33. Un plan devrait être établi pour la protection, la conservation, la mise en valeur et la réanimation des ensembles historiques et artistiques. Il devrait comprendre des périmètres de protection, fixer les conditions d'utilisation du sol et mentionner les immeubles à conserver et les conditions de cette conservation. Ce plan devrait s'insérer dans l'ensemble de la politique d'urbanisme et d'aménagement du territoire pour les zones intéressées.

34. Les plans de réanimation devraient déterminer les fonctions dévolues aux immeubles historiques et les rapports entre le secteur de réanimation et le tissu urbain environnant. Lorsque l'établissement d'un secteur de réanimation est à l'étude, les collectivités locales et les représentants des habitants devraient être consultés.

35. Tous les travaux qui pourraient avoir pour effet de modifier l'état des immeubles compris dans un secteur protégé ne devraient être soumis à l'autorisation des services responsables de l'aménagement du territoire, qu'après avis favorable des services responsables de la protection du patrimoine culturel et naturel.

36. Dans la mesure où elles ne modifient pas les dispositions caractéristiques des demeures anciennes, les transformations intérieures devraient être autorisées en vue de doter les ensembles du confort nécessaire à l'agrément de leurs occupants.

37. Les États membres devraient mettre au point des plans à court et à long terme, fondés sur les inventaires de leur patrimoine naturel, plans visant à disposer d'un réseau qui réponde aux besoins de leur nation.

38. Les États membres devraient créer un service consultatif chargé de guider les organisations non gouvernementales et les propriétaires fonciers sur les politiques de conservation nationale compatibles avec une utilisation productive de la terre.

39. Les États membres devraient élaborer des politiques et des programmes visant à la restauration de zones naturelles qui ont été dégradées par l'industrie ou d'autres actions humaines.

Mesures juridiques

40. En raison de l'intérêt qu'il présente, le patrimoine culturel et naturel devrait être protégé, dans ses éléments individuels ou dans sa totalité, par des mesures législatives ou réglementaires, selon la compétence et les procédures juridiques de chaque pays.

41. Les mesures de protection devraient être, si nécessaire, élargies par de nouvelles dispositions, destinées à renforcer la conservation du patrimoine culturel ou naturel et faciliter la mise en valeur de ses éléments constitutifs. A cette fin, le respect des mesures de protection devrait être imposé aux propriétaires privés et aux collectivités publiques lorsqu'elles sont propriétaires d'éléments du patrimoine culturel ou naturel.

42. Lorsqu'un immeuble est situé à l'intérieur ou aux abords d'un bien protégé, il ne devrait faire l'objet d'aucune construction nouvelle, d'aucune démolition, d'aucun déboisement, d'aucune transformation ou modification de nature à en affecter l'aspect sans une autorisation des services spécialisés.

43. Les textes législatifs relatifs à l'implantation d'industries, ou à des travaux publics et privés, devraient tenir compte des législations existantes en matière de conservation. Les autorités responsables de la protection du patrimoine culturel et naturel pourraient intervenir, afin de hâter l'exécution des travaux de conservation nécessaires, en aidant le propriétaire par des interventions financières, en se substituant à lui et en exécutant d'office les travaux, quitte à obtenir le remboursement de la part qui lui aurait normalement incombé.

44. Un immeuble ou un site naturel protégé pourrait être exproprié par les autorités publiques dans l'intérêt de la conservation du patrimoine conformément aux conditions fixées par la législation intérieure.

45. Les États membres devraient réglementer l'affichage, la publicité lumineuse ou non, les enseignes commerciales, le camping, l'apposition de supports, de câbles électriques ou téléphoniques, l'installation d'antennes de télévision, la circulation et le stationnement de tous véhicules, l'apposition de plaques indicatrices, l'installation de mobilier urbain, etc., et d'une manière générale, tous équipements ou occupation de biens entrant dans le patrimoine culturel ou naturel.

46. Les effets des mesures prises pour la protection d'éléments du patrimoine naturel ou culturel devraient suivre ces éléments en quelque main qu'ils passent. Quiconque aliène un immeuble ou un site naturel protégé devrait faire connaître à l'acquéreur l'existence de la protection.

47. Conformément aux dispositions légales et constitutionnelles de chaque État, des peines devraient être prévues ou des sanctions administratives imposées à quiconque aurait intentionnellement détruit, mutilé ou dégradé un monument, un ensemble, un site protégé ou présentant un intérêt archéologique, historique ou artistique. Ces mesures pourraient être complétées par la confiscation des équipements utilisés pour des fouilles illicites.

48. Des peines ou des sanctions administratives devraient atteindre les auteurs de toutes autres infractions à la protection ou à la mise en valeur d'un bien, protégé du patrimoine culturel ou naturel; des sanctions devraient également prévoir le rétablissement des lieux dans leur état antérieur, suivant des normes scientifiques et techniques.

Mesures financières

49. Les autorités centrales et locales devraient, autant que possible, consacrer dans leur budget un certain pourcentage de crédits, proportionnel à l'importance des biens protégés entrant dans leur patrimoine culturel et naturel, afin de satisfaire à l'entretien, à la conservation et à la mise en valeur de ceux de ces biens dont ils sont propriétaires et de participer financièrement auxdits travaux accomplis sur de tels biens par leurs propriétaires publics ou privés.

50. Les dépenses qui résultent de la protection, de la conservation et de la mise en valeur des biens du patrimoine culturel et naturel qui sont propriété privée devraient autant que possible incomber à leurs propriétaires ou à leurs utilisateurs.

51. Des régimes fiscaux privilégiés, des dons ou des prêts accordés à des conditions favorables, pourraient être consentis aux propriétaires privés, à condition qu'ils procèdent aux travaux de protection, de conservation, de mise en valeur et de réanimation de leurs biens immobiliers, sous réserve que les travaux à effectuer soient conformes aux normes reconnues en la matière.

52. Des indemnités pourraient être accordées si besoin est aux propriétaires de sites culturels et naturels protégés pour les dommages qu'ils auraient subi du fait de la mise en oeuvre d'un programme de protection.

53. Les avantages financiers consentis aux propriétaires privés devraient éventuellement être subordonnés au respect de certaines conditions imposées au profit du public : accès aux parcs, aux jardins et aux sites, visite totale ou partielle des sites naturels, des intérieurs des monuments et des ensembles, prises de vues, etc.

54. Des dotations spéciales devraient être prévues dans les budgets des collectivités publiques pour la protection du patrimoine culturel et naturel mis en péril par de grands travaux publics ou privés.

55. Pour accroître les moyens financiers à leur disposition, les États membres pourraient instituer une ou plusieurs « Caisse(s) pour le patrimoine culturel et naturel », établissements publics financiers dotés de la personnalité morale, pouvant recevoir les libéralités de particuliers, notamment des entreprises industrielles et commerciales.

56. Des régimes fiscaux privilégiés devraient également être consentis aux particuliers faisant des dons ou libéralités pour l'acquisition, la restauration ou l'entretien d'éléments spécifiques du patrimoine culturel ou naturel.

57. Afin de faciliter les opérations de réanimation du patrimoine naturel et culturel, les États membres pourraient prendre des mesures particulières, notamment sous forme de prêts, pour la rénovation et la restauration, et pourraient aussi prendre les mesures réglementaires indispensables pour éviter la hausse spéculative des prix de terrains dans les zones considérées.

58. Pour éviter les mutations de populations au détriment des habitants les moins favorisés dans les immeubles ou les ensembles réanimés, des indemnités compensatrices de hausse de loyer pourraient être envisagées en vue de permettre aux habitants des immeubles soumis à réanimation de conserver leur logement. Ces indemnités, temporaires, déterminées en fonction des revenus des intéressés, permettraient à ces derniers de faire face à des charges accrues, inhérentes aux travaux accomplis.

59. Les États membres pourraient faciliter le financement des travaux, quelle que soit leur nature, accomplis au profit du patrimoine culturel et naturel, en instituant une « Caisse de prêts », organisme bénéficiant de l'aide d'institutions publiques et d'établissements de crédits privés, chargée de consentir des prêts aux propriétaires à des taux d'intérêt réduit assortis de délais de remboursement étendus.

VI. Action éducative et culturelle

60. Des cours réguliers, des conférences, des stages d'études, etc., sur l'histoire de l'art, l'architecture, l'environnement et l'urbanisme devraient être donnés par les universités, les établissements d'enseignement à tous les niveaux et ceux qui se consacrent à l'éducation permanente.

61. Une action éducative devrait être entreprise par les États membres en vue d'éveiller l'esprit de la population et de développer leur respect à l'égard du patrimoine culturel et naturel. Un effort continu devrait être poursuivi pour informer le public sur les réalités de la protection du patrimoine culturel ou naturel et pour lui inculquer l'appréciation et le respect des valeurs qu'il comporte. A cet effet, il faudrait faire appel, selon les besoins, à tous les moyens d'information.

62. Tout en prenant en considération la grande valeur économique et sociale du patrimoine culturel et naturel, des mesures devraient être prises pour promouvoir et renforcer la haute valeur culturelle et éducative de ce patrimoine qui constitue la motivation fondamentale de sa protection, de sa conservation et de sa mise en valeur.

63. Toute intervention en faveur des biens du patrimoine culturel et naturel devrait tenir compte de cette valeur culturelle et éducative qui résulte de leur qualité de témoins d'un environnement, d'une architecture et d'un urbanisme à la mesure et à l'échelle humaines.

64. Des organisations bénévoles devraient être créées afin d'encourager les autorités nationales et locales à user pleinement de leurs pouvoirs en matière de protection, à les soutenir et éventuellement à leur procurer des fonds. Ces organismes devraient entretenir des rapports avec les sociétés historiques locales, les sociétés d'embellissement, les comités d'initiative, les organismes s'occupant du tourisme, etc.; elles pourraient également organiser pour leurs membres des visites et des promenades commentées dans des biens culturels et naturels.

65. Des centres d'initiative, des musées et des expositions pourraient être organisés, pour expliquer les travaux entrepris sur les biens culturels et naturels réanimés.

VII. Coopération internationale

66. Les États membres devraient collaborer dans le domaine de la protection, de la conservation et de la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel, en ayant recours, si cela paraît souhaitable, à l'aide d'organisations internationales, intergouvernementales et non gouvernementales. Cette coopération, multilatérale ou bilatérale, devrait être judicieusement coordonnée et se concrétiser par des mesures telles que les suivantes :

a. Échange d'informations et de publications scientifiques et techniques;

b. Organisation de stages d'études et de groupes de travail sur des sujets déterminés;

c. Octroi de bourses d'études et de voyages, et envoi du personnel scientifique, technique et administratif et du matériel;

d. Octroi de facilités pour la formation scientifique et technique à l'étranger, grâce à l'admission de jeunes chercheurs et techniciens dans les chantiers d'architecture et de fouilles archéologiques ainsi que sur les sites naturels dont il s'agit d'assurer la conservation;

e. Coordination dans un groupe d'États membres de grands projets de conservation, de fouilles, de restauration et de réanimation en vue de la diffusion de l'expérience acquise.


Le texte qui précède est le texte authentique de la Recommandation dûment adoptée par la Conférence générale de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture à sa dix-septième session, qui s'est tenue à Paris et qui a été déclarée close le vingt et unième jour de novembre 1972.


 

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