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 » La montée des inégalités extrêmes est une préoccupation pour nous tous
17.03.2017 - Secteur des sciences sociales et humaines

La montée des inégalités extrêmes est une préoccupation pour nous tous

© Shutterstock.com / saiko3p

Les 1% les plus riches de la population mondiale possèdent aujourd’hui autant que l’ensemble du reste du monde. Ceci confirme la déclaration d'Oxfam selon laquelle l'inégalité économique extrême devient incontrôlable.

Ce phénomène est injuste et dépourvu de toute morale, et ses conséquences sont corrosives pour chacun d’entre nous. Les inégalités extrêmes corrompent la politique, entravent la croissance économique et étouffent la mobilité sociale. Elles alimentent le crime et les conflits violents. Elles touchent un nerf moral en menaçant la santé même de nos démocraties, où les pouvoirs politique et économique sont saisis par des élites. La montée rapide des inégalités économiques extrêmes est un obstacle à l'élimination de la pauvreté dans le monde.

Si l'Inde devait réduire les inégalités de 36%, elle pourrait pratiquement éliminer l'extrême pauvreté d'ici 2019 (Oxfam, 2014). Notre recherche a montré que l'inégalité est le chaînon manquant qui peut expliquer comment le même taux de croissance dans différents pays peut conduire à différents taux de réduction de la pauvreté.

Selon le Overseas Development Institute, 200 millions des 1,1 milliard de personnes vivant dans des conditions d’extrême pauvreté en 2010 auraient pu y échapper si elles avaient pu bénéficier à parts égales du produit de la croissance pendant la période des Objectifs du Millénaire pour le développement (Hoy et Samman, 2015). Selon les projections des économistes de la Banque mondiale, pour éliminer l'extrême pauvreté d'ici 2030, les plus pauvres doivent bénéficier d'une croissance de 2 points plus élevée que le reste de la population (Lakner et al., 2014). Une part égale de croissance ne suffit pas et laisserait près de 200 millions de personnes supplémentaires piégées dans l'extrême pauvreté (Oxfam, 2015).

Un niveau d'inégalité élevé constitue un obstacle à la croissance économique future car il freine les investissements productifs, limite la capacité productrice et de consommation des économies et affaiblit les institutions nécessaires à des sociétés équitables. Les chercheurs du Fonds monétaire international (FMI) ont constaté qu'une augmentation dans la part du revenu des pauvres et de la classe moyenne augmente en fait la croissance, alors que faire de même pour les 20% ayant les revenus les plus élevés entraîne une croissance plus faible (Dabla-Norris et al., 2015).

Les inégalités extrêmes sont « une source de déchets humains et économiques inutiles » selon l'économiste de Cambridge Ha-Joon Chang (cité dans Oxfam, 2014, p. iii). Les inégalités extrêmes sont une préoccupation immédiate pour tous, et elles doivent être traitées sans délai. Les organismes internationaux et les gouvernements doivent accorder plus d'attention à l'écart entre les plus riches et les plus pauvres, et suivre les richesses et les transferts de revenus aux extrémités de ces inégalités. Il est impératif d'avoir accès à des données de bonne qualité afin de pouvoir mener des recherches plus approfondies sur les causes de la richesse extrême et les inégalités de revenus, et leur impact sur la pauvreté.

L'inégalité n'est pas inévitable. Les gouvernements peuvent réduire les extrêmes économiques en adoptant un ensemble de mesures redistributives, incluant des systèmes fiscaux plus progressifs qui redistribuent les revenus plus équitablement, et augmentant les investissements dans des services publics et des programmes de protection sociale universels, de bonne qualité et gratuits.

L'augmentation du nombre d'emplois décents pour un salaire décent est également essentielle. Les emplois de bonne qualité sont par nature ceux qui paient un salaire décent, assurent la sécurité de l'emploi et le respect des droits des travailleurs, et assurent l'égalité de rémunération pour les femmes.

Il existe cependant une dynamique de pouvoir à résoudre, et les décideurs politiques doivent répondre de leurs actions à la société civile. Les gouvernements et les institutions publiques doivent se rendre compte qu'ils sont avant au service de leurs citoyens, et non de leurs intérêts personnels. Les gouvernements sont tenus de protéger les droits de l'homme, ce qui implique d'empêcher les intérêts commerciaux d'affaiblir ces droits. Ce n'est que dans ces conditions que nous nous attaquerons avec succès au fléau de l'inégalité économique extrême.

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Cet article a été rédigé par Winnie Byanyima dans le cadre du Rapport mondial sur les sciences sociales 2016.


A propos de l'auteur

Winnie Byanyima (Ouganda) est directrice exécutive d'Oxfam International. Elle est leader dans le domaine des droits des femmes, la gouvernance démocratique et la consolidation de la paix. Durant  onze ans, elle a été au service du Parlement ougandais. Elle a également siégé à la Commission de l'Union africaine et occupé le poste de Directrice des questions de genre et de développement au PNUD. Elle a cofondé le Global Gender and Climate Alliance, composée de 60 membres, et a présidé un groupe de travail de l’ONY sur l’égalité hommes-femmes dans le cadre des objectifs du Millénaire pour le développement et le changement climatique.




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