Le Centre du patrimoine mondial et l'ICOMOS ont été informés par plusieurs ONG de l'aménagement de la ligne de train à grande vitesse (AVE) Madrid/Saragosse/Barcelone/Frontière française, qui implique la construction d'un tunnel sous la ville de Barcelone.
Dans un courrier en date du 23 janvier 2008, l'Etat partie a remis un dossier complet d'informations sur l'état d'avancement du projet et sur les évaluations techniques réalisées, et, a en outre précisé que le tracé final du tunnel n'avait pas encore été défini.
De vives préoccupations se sont exprimées à l'apparition de fissures sur les bâtiments situés au dessus des parties du tunnel déjà réalisées à l’extérieur de Barcelone et dans la perspective d'impacts identiques à venir sur les bâtiments du centre ville de Barcelone. La partie du tunnel susceptible d'endommager l'Eglise de la Sagrada Familia traverserait la rue Mallorca. Le tunnel, d'un diamètre d'environ 12 mètres, creusé à 30 mètres de fond, se situerait à environ 3 à 4 mètres de la Façade de la Gloire de l'Eglise. Pour prévenir tout dommage éventuel lié à la construction du tunnel et au passage du train à grande vitesse, l'équipe technique a proposé qu'un mur renforcé en coulis de ciment long de 240 mètres, profond de 42 mètres, composé de piliers de 1,50 mètre, chaque pilier étant espacé de 2 mètres, soit construit. Ce mur serait à 1,75 mètre des fondations de l'Eglise et à 0,75 mètre du tunnel.
Le Comité constructeur de l'Eglise de la Sagrada Familia a reçu un certain nombre de rapports établis par des spécialistes, qui ont été étudiés par l'ICOMOS en complément de la documentation remise par l'Etat partie. L'ICOMOS se montre préoccupée par le fait que la construction du tunnel et du mur de protection menace l'intégrité de la structure de l'église, notamment à cause des déplacements différentiels plus amples que ceux prévus lors du projet de construction de l'Eglise et des possibles mouvements géologiques à venir. L'ICOMOS remarque que lors de la construction des tours de la Nativité, elles se sont tassées de quelques centimètres à cause de leur poids, des caractéristiques de la pierre utilisée et des fondations en mortier de chaux, provoquant des fissures sur la façade et sur les vitraux mitoyens.
L'ICOMOS signale par ailleurs les menaces potentielles pesant sur les fragiles structures de l'Eglise, menaces liées à l'impact des vibrations provoquées par le passage des trains. Le passage de trains, composés de wagons d'un poids total de 80 tonnes, produira des vibrations qui seront transmises au sol tant par l'air que directement par les rails. Les vibrations se propageront à travers le sol jusqu'aux fondations puis de celles-ci à la structure du bâtiment. Le mur composé de piliers tel qu'il est proposé n'est pas considéré comme une mesure de protection suffisante contre ce type d'impact.
La préoccupation de l'ICOMOS est justifiée par, entre autre, l'absence d'évaluation de l'impact dynamique des vibrations sur la fragile structure et sur les fondations de l'église ainsi que sur le mur de protection composé de piliers. Il manque en outre une étude sur les conséquences des vibrations sur la résistance de l'Eglise, tant sur ses voûtes que sur le reste de ses structures.
L'ICOMOS remarque par ailleurs, qu'outre les potentiels et irréparables dommages à la structure de l'Eglise, il existe un risque de blessure physique pour les personnes suite à la chute d'objets provenant de l'Eglise.
Suite aux objections présentées par le Comité constructeur de l'Eglise, un rapport établi par le Ministère espagnol de l'environnement estime que l'utilisation d'une machine de percement de tunnel de type EPBS, associé à un équipement de suivi, garantirait que l'Eglise ne subisse pas de graves conséquences suite à la construction du tunnel puis au passage des trains à grande vitesse.
Malgré ces assurances, le Centre du patrimoine mondial et l'ICOMOS ne sont pas convaincus que l'Eglise sera protégée à 100% des graves impacts, ni au cours de la construction du tunnel ni dans le cadre de sa future utilisation. Selon le Centre du patrimoine mondial et l'ICOMOS, la solution la plus prudente consisterait à redéfinir le tracé du tunnel à une distance plus éloignée du bien et de tout autre bien du patrimoine mondial situé aux alentours.