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Grands singes, perte de biodiversité et COVID-19 - Retour sur une course à la connaissance

22/09/2020
03 - Good Health & Well Being
11 - Sustainable Cities and Communities
15 - Life on Land

Au début de l'année 2020, alors que le monde découvrait la propagation de l'infection COVID-19 avec une inquiétude et une détresse croissantes, les experts se sont également tournés avec crainte vers nos plus proches cousins. La déclaration commune publiée en mars 2020 par l'UICN et le Groupe de spécialistes des primates était claire : rien ne prouvait que les grands singes étaient à risque face à la COVID-19 mais, étant très sensibles aux agents pathogènes respiratoires humains en général, la COVID-19 pouvait donc leur être fatal. Depuis lors, une course à la connaissance est entreprise pour protéger les grands singes, en particulier ceux vivant à l’état sauvage. 

L'UNESCO a lancé une série de discussions en ligne sur la biodiversité et notre relation avec la nature. Ces discussions, réunissant la société civile, des experts scientifiques et des décideurs, ont abordé chacune un point de vue différent sur la crise sanitaire, ses origines et ses conséquences. Un webinaire en particulier a jeté un éclairage sur la crise de la biodiversité qui a conduit à la pandémie et sur la menace supplémentaire qu'elle représente pour les grands singes. Les experts invités à intervenir ont mis en évidence 3 facteurs principaux pour comprendre les racines de la crise et comment la surmonter. 

Comprendre la santé de la biodiversité

La pandémie a fait comprendre que notre relation collective avec la nature était malade. Le braconnage et la déforestation rassemblent des espèces qui ne se rencontrent pas naturellement et exposent les humains à des agents pathogènes d'origine zoonotique. Ces derniers constituent 70 % des maladies émergentes. Un rapport récent du Programme des Nations Unies pour l'Environnement et de l'Institut international de recherche sur l'élevage détaille les mécanismes entre la perte de biodiversité et les zoonoses et la façon dont elles continueront à apparaître si nous continuons sur cette même lancée. Cependant, une conséquence positive imprévue de la crise de la COVID-19 est que l'humanité est maintenant consciente de l'importance de maintenir une biodiversité saine. L'approche "One Health" (une santé), qui conjugue la santé humaine, animale et environnementale, prend maintenant de l'ampleur dans le cadre d'un changement de paradigme. Pour maintenir et capitaliser sur cette nouvelle dynamique, cette compréhension collective, il est crucial de se pencher sur les communautés les plus directement touchées et de travailler avec elles. Les communautés peuvent devenir un moteur pour la conservation de la biodiversité en présentant la manière dont la conservation garantit la durabilité des activités. 

Améliorer les connaissances

Pour les scientifiques du monde entier, la COVID-19 est devenue une course contre la montre. Au moment où cet article est publié, des vaccins ou des traitements échappent encore aux chercheurs, alors même que le nombre de victimes augmente. De même, les primatologues se sont engagés dans une telle course pour découvrir comment ce nouveau virus pourrait affecter les grands singes et pour concevoir des mesures de sécurité et atténuer les risques. Pour gagner du temps, à l’instar des humains qui se sont confinés, les autorités ont interdit l'accès aux parcs naturels aux visiteurs et aux gardes forestiers et les scientifiques ont été, pour la plupart, renvoyés chez eux. Améliorer les connaissances sur la santé des grands singes et sur leur santé environnementale est donc vital pour préserver l'espèce de l'extinction. Dans ce contexte, l'UNESCO, avec le Musée national français d'histoire naturelle (MNHN) et le projet sur les chimpanzés de Sebitoli en Ouganda, développent un projet d'étude et de surveillance des grands singes et de leurs habitats dans 19 réserves de biosphère africaines avec des drones, ce qui réduit les perturbations humaines dans les zones protégées et prévient tout risque de transmission de maladies zoonotiques. Le projet se concentrera spécifiquement sur la santé de la biodiversité, selon l'approche "One Health". 

Protection des habitats

Un effet positif et inattendu de la COVID-19 qui a été largement commenté est la diminution de la pollution : un bol d’air frais dans un moment autrement tendu. Un autre effet a été l'apparition d'animaux sauvages dans des zones urbaines, ce qui a permis de réaliser que ces espaces, dominés par l'humain, sont toujours partagés avec la nature. Moins visible mais tout aussi importante a été la diminution des déchets trouvés dans la nature, facteur de transmission de maladies zoonotiques aux animaux sauvages ou, au moins pendant le confinement, l'absence de grands singes tués par le trafic routier. Cependant, avec le risque élevé de famine dû au manque de viande disponible dans certaines régions du monde et la hausse des prix qui en résulte, le braconnage et la chasse illégale n'ont pas cessé. La COVID-19 n'est qu'un risque parmi d'autres qui pourrait entraîner l'extinction de nos plus proches cousins dans le règne animal. Avec le rythme actuel de déclin, il est même possible que cette extinction se produise de notre vivant. Avec ses 39 sites désignés (sites du patrimoine mondial et/ou réserves de biosphère) dans 23 pays d'Afrique et d'Asie qui abritent ou sont dans l'aire de répartition des grands singes, l'UNESCO couvre actuellement toutes les sous-espèces de grands singes sauf une, le gorille de Cross River. L'UNESCO travaille avec le Cameroun et le Nigeria pour désigner la zone Cross-River comme réserve de biosphère transfrontalière. Pour sa part, le Nigeria a soumis un dossier de nomination de réserve de biosphère pour cette zone. L'UNESCO travaille avec ses États membres au sein de ces sites pour construire des sociétés prospères en harmonie avec son environnement. Cela implique de travailler spécifiquement avec les communautés locales pour les aider à s'approprier les efforts de conservation, de protection et de développement durable. La proximité des habitats des grands singes, par exemple, augmente les risques de transmission des maladies zoonotiques. Pour sensibiliser à cette question dans le cadre de la crise sanitaire, l'UNESCO, avec le soutien du projet sur les chimpanzés de Sebitoli en Ouganda, a conçu une série d'affiches destinées aux communautés, mais aussi aux gardes forestiers et/ou aux employés du parc, détaillant les recommandations de sécurité pour prévenir la transmission entre humains mais aussi entre humains et animaux. 

La connaissance est un voyage constant et chaque étape est remplie de plus d'informations, et de plus de questions. Cependant, ce n'est pas un voyage qui doit être entrepris seul. Les communautés de connaissances, régulières ou ad hoc, favorisent la diffusion des informations et des bonnes pratiques et, dans le cas de nos webinaires, peuvent contribuer à atteindre des objectifs importants tels que la protection des espèces contre l'extinction et contre le temps. Les webinaires rassemblent des scientifiques mais aussi de nombreux gestionnaires de sites qui abritent des grands singes, des décideurs et des membres de la société civile, tous désireux d'obtenir des informations et des conseils. L'UNESCO, en tant que centre d'échange d'informations et laboratoire d'idées, continuera à organiser et à maintenir des plateformes d'échanges et à diffuser ses résultats.  
 

COVID19 et perte de la biodiversité : une nouvelle menace pour les grands singes?

Extraits et présentations

Shamila Nair Bedouelle

Professeur Inza Koné

Professeur Sabrina Krief

Dr Anton Nurcahyo

Noëline Raondry Rakotoarisoa

Miguel Clüsener-Godt