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Interview

Questions-réponses : les pays africains doivent reconstruire l’égalité pour l’éducation des filles et tirer les leçons de la crise de la COVID-19

28/09/2020
04 - Quality Education

À l’heure actuelle, plus de 875 millions d’apprenants dans le monde sont encore concernés par la fermeture des établissements scolaires pour cause de COVID-19, principalement en Afrique subsaharienne. Au niveau mondial, l’UNESCO estime que 23,8 millions d’apprenants, du préprimaire à l’enseignement supérieur, risquent de ne pas reprendre le chemin de l’école, dont 11,2 millions de filles et de jeunes femmes.

D’après Aïcha Bah Diallo, ancienne ministre de l’éducation de la Guinée et membre fondateur du Forum des éducatrices africaines (FAWE), l’Afrique fait face à une crise de l’éducation sans précédent alors qu’elle s’efforce d’atténuer les conséquences des fermetures d’écoles. Également membre du jury du Prix UNESCO pour l’éducation des filles et des femmes, Mme Bah Diallo a pris le temps d’évoquer avec l’UNESCO ce qu’elle et ses collègues observent dans la région, ainsi que les principales priorités de demain dans le domaine de l’éducation des filles et des femmes en Afrique.

Quelles sont les conséquences immédiates des fermetures d’établissements scolaires pour cause de COVID-19 en Afrique ?

La pandémie de COVID-19 a marqué le début d’une crise qui touche la santé, l’éducation, l’économie et la sécurité alimentaire dans la région.

Toutes les écoles publiques et privées, ainsi que tous les autres établissements d’enseignement sont fermés depuis mars dernier dans la plupart des pays africains, et l’on prend conscience que la région n’a pas suffisamment investi dans la santé ni dans l’éducation. Si les écoles restent fermées encore longtemps, non seulement les enfants seront privés de possibilités d’apprentissage essentielles, mais ils seront en outre davantage exposés aux risques de travail forcé et de malnutrition, puisqu’ils ne bénéficient plus du repas quotidien habituellement fourni à l’école.

En ce qui concerne les filles, les conséquences sont plus graves, surtout pour les plus vulnérables et marginalisées d’entre elles. Nous savons que les filles seront exposées aux risques de mariage précoce et forcé et de grossesse précoce, ce qui les empêchera de poursuivre ou reprendre leurs études.

L’expérience montre que les filles sont touchées de manière disproportionnée par la crise. Quelles solutions éducatives de substitution sont mises en œuvre dans la région pour assurer la continuité de l’apprentissage des filles et des femmes ?

Les sections nationales du FAWE rapportent que les élèves déscolarisés de la région sont encouragés à suivre les émissions éducatives diffusées à la télévision, à la radio ou sur Internet, et que certains établissements ont recours à des plates-formes de réseaux sociaux telles que Telegraph pour partager des contenus pédagogiques.

Bien que ces initiatives aillent dans le bon sens, les solutions de substitution qui permettent d’assurer la continuité de l’apprentissage ne bénéficient pas à la plupart des filles, des femmes et des membres des autres groupes vulnérables et défavorisés, en raison de leur accès limité à la technologie. Si 80 % des foyers africains ont accès à la radio, seulement 34 % d’entre eux ont accès à Internet. D’après l’Institut international de l’UNESCO pour la planification de l’éducation, 89 % des apprenants d’Afrique subsaharienne n’ont pas accès à un ordinateur à leur domicile.

Cet écart dans l’apprentissage engendre chez les filles un niveau élevé d’anxiété quant à leur avenir. En outre, l’isolement social qui s’ajoute à la déscolarisation a des répercussions sur l’apprentissage socio-émotionnel des filles et sur leur bien-être général.

Nous devons collaborer étroitement avec les parents pour repérer ceux qui ne sont pas parvenus à aider leurs filles dans leur travail scolaire pendant cette période. Des cours de rattrapage devront être mis en place afin que ces élèves ne quittent pas définitivement l’école.

En ce qui concerne l’avenir, comment « reconstruire l’égalité » pour l’éducation des filles et des femmes en Afrique et ailleurs après cette crise planétaire ?

La COVID-19 a mis en lumière les inégalités qui existent au sein des systèmes éducatifs et des sociétés du continent africain, de manière générale. Tout en luttant contre le virus, les pays doivent se tourner vers l’avenir et définir des stratégies pour éliminer les obstacles structurels et systémiques qui renforcent ces inégalités.

Ils doivent par exemple créer et favoriser un environnement propice au développement de l’infrastructure numérique afin que tous les apprenants, garçons ou filles, dans les zones rurales ou urbaines, aient accès aux plates-formes d’apprentissage interactives en ligne. Celles-ci doivent également servir à former les enseignants aux programmes d’enseignement à distance, de façon à garantir l’accès de tous les apprenants à une éducation de qualité.

Concrètement, nos ministères de l’éducation doivent mener des négociations avec les opérateurs de téléphonie mobile et les entreprises de télécommunications pour obtenir des forfaits Internet équitables et d’un prix raisonnable, qui garantiront l’enseignement à distance pour tous.

Il est également primordial de documenter les enseignements tirés dans les différents pays durant la crise, et de faire de la collecte et la ventilation des données une priorité.

Cette crise est l’occasion de réformer l’éducation en Afrique pour en faire un système dynamique, équitable et résilient qui soit capable de résister aux crises futures. Les femmes et les filles doivent occuper une place centrale dans les premières interventions ainsi que dans la planification à long terme.

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