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Global Education Monitoring Report

Migration interne

D’après les estimations, 763 millions de personnes vivent dans une région autre que celle où elles sont nées. De tous les modèles de déplacement possibles, qu’ils soient permanents ou temporaires, qu’ils s’effectuent entre zones rurales et zones urbaines ou à l’intérieur de ces zones, l’exode rural et les flux migratoires saisonniers ou circulaires sont les plus déstabilisants pour les systèmes éducatifs.

CRÉDIT: Louise Dyring mbae/Save the Children. Zie est un garçon de 11 ans en 5e année qui a vécu dans un pensionnat dans le comté de Weishan, République populaire de Chine.

Si les déplacements massifs vers les villes qui ont accompagné la croissance économique entre le XIXe siècle et le milieu du XXe siècle ont touché les pays à revenu élevé, les migrations internes les plus importantes se concentrent aujourd’hui dans les pays à revenu intermédiaire, en particulier la Chine et l’Inde. En Afrique subsaharienne, l’exode rural a aussi créé de sérieux problèmes d’aménagement urbain.

Les taux de migration varient en fonction de l’âge, mais ils sont généralement plus élevés chez les jeunes d’une vingtaine d’années. Dans le domaine de l’éducation, la migration interne touche une proportion relativement faible d’enfants en âge de scolarisation primaire et une proportion légèrement plus forte de jeunes en âge de scolarisation secondaire. La meilleure qualité de l’éducation dans les villes n’en demeure pas moins la raison majeure qui incite des jeunes à migrer. En Thaïlande, 21 % des jeunes déclarent avoir quitté leur pays pour leurs études.

Plus son niveau d’instruction est élevé, plus la probabilité qu’un individu se réinstalle ailleurs pour mieux rentabiliser son investissement dans l’éducation est forte (Figure 1). Qui plus est, les préférences et les aspirations qui caractérisent tout individu instruit le poussent à quitter le milieu rural quelles que soient les perspectives de revenu. Dans 53 pays, la probabilité de migration a doublé chez ceux qui ont suivi une scolarité primaire, triplé chez ceux qui ont suivi une scolarité secondaire et quadruplé chez ceux qui ont suivi des études supérieures, par rapport à ceux qui sont sans instruction.

Figure 1: La probabilité de migration interne est d’autant plus forte que le niveau d’études est plus élevé

La migration améliore souvent, mais pas toujours, les résultats éducatifs

L’exode des ruraux vers les villes peut améliorer le niveau d’études dans les pays où l’accès à l’éducation en zones rurales est limité. En Indonésie, parmi un groupe d’individus nés dans une sélection de districts ruraux, ceux qui sont partis à la ville dans leur enfance ont été scolarisés trois années de plus que ceux qui sont restés à la campagne.

Les enfants migrants n’ont cependant pas toujours une progression scolaire aussi rapide que leurs pairs. Au Brésil, parmi les adolescents nés en 2000/01 dans la région du Nord-Est, ceux qui ont migré au moment de leur scolarité secondaire ont progressé beaucoup plus lentement que leurs camarades restés à la campagne. Divers facteurs peuvent faire obstacle à l’éducation des enfants touchés par la migration interne, que ce soit la précarité de leur statut juridique, la pauvreté, le désintérêt des pouvoirs publics ou encore les préjugés et les stéréotypes.

 

LES MÉCANISMES DE RÉGULATION DES MIGRATIONS INTERNES INFLUENT SUR L’ACCÈS À L’ÉDUCATION

Dans de nombreux pays, la crainte d’une urbanisation non durable et d’un déséquilibre entre zones rurales et zones urbaines a poussé les autorités à élaborer des politiques restrictives en matière de migration qui peuvent avoir des conséquences sur l’accès des migrants à l’éducation. Au Viet Nam, à cause du système ho-khau qui limite l’accès des migrants à l’enseignement public, les migrants pauvres d’origine rurale venus s’installer en ville sont refoulés dans des quartiers sous-équipés en écoles publiques. Malgré les réformes introduites récemment pour mettre fin à ce dispositif, les politiques héritées du passé demeurent défavorables aux migrants temporaires.

En Chine, le hukou est un système d’enregistrement qui conditionne l’accès aux services au lieu de naissance, excluant ainsi les enfants de migrants ruraux de l’école publique. Ce système a été profondément remanié ces dernières années. Depuis 2006, le gouvernement impose aux autorités locales d’assurer l’accès à l’éducation des enfants migrants. Après avoir instauré la gratuité de l’enseignement public pour les enfants de migrants ruraux en 2008, il a entrepris de dissocier l’enregistrement de la résidence de l’accès aux services en 2014. Depuis 2016, toutes les villes, hormis les plus grandes, sont tenues de poursuivre l’assouplissement de ces restrictions.

Cela étant, pour les migrants, les obstacles à l’éducation n’ont pas tous été levés. Les formalités administratives et les autres contraintes d’admission en limitent encore l’accès. À Beijing, les migrants doivent produire cinq certificats pour pouvoir s’inscrire dans une école publique. Certains enseignants ont une attitude discriminatoire à l’égard des jeunes migrants. Dans les écoles clandestines pour migrants, les enseignants sont souvent mal rémunérés et n’ont aucune sécurité de l’emploi, et de nombreux parents se plaignent de la qualité médiocre de l’enseignement qui y est dispensé.

LES ENFANTS RESTÉS AU PAYS SONT CONFRONTÉS À DES DIFFICULTÉS PARTICULIÈRES DANS LE DOMAINE DE L’ÉDUCATION

Les migrations ont aussi une incidence sur l’éducation de millions d’enfants laissés au pays avec un seul parent ou d’autres membres de la famille. Au Cambodge, ces enfants sont majoritairement des filles et ont un risque d’abandon scolaire plus élevé.

Selon les estimations présentées dans le China Family Development Report 2015, 35 % d’enfants restent à la campagne tandis que leurs parents partent à la ville. Les données probantes relatives à l’impact des migrations sur l’éducation et le bien-être de ces enfants restés au pays sont contradictoires. Certaines études font ressortir un effet positif sur les performances. D’autres, à l’inverse, révèlent que les enfants laissés derrière eux par leurs parents ont de moins bonnes notes et sont psychologiquement plus fragiles que leurs camarades.

Depuis 2016, la Chine a mis en place des politiques qui visent à améliorer la prise en charge de ces enfants laissés pour compte, notamment en demandant aux autorités locales d’inciter leurs parents à désigner un tuteur. Les internats scolaires sont une solution courante, mais ils manquent souvent de personnel et d’équipements. Mieux former le personnel administratif à la gestion de ces établissements est indispensable pour améliorer le bien-être des enfants.

Alors que ces établissements sont très répandus dans certains pays, les statistiques sur les internats et leurs effectifs font défaut. En Ouganda, les internats accueillent 15 % d’élèves âgés de moins de 13 ans, et ce pourcentage peut atteindre 40 % en fin de deuxième cycle de l’enseignement secondaire.

LA MIGRATION DE MAIN D’ŒUVRE SAISONNIÈRE INFLUE SUR LES POSSIBILITÉS D’ÉDUCATION

Les migrations ont aussi une incidence sur l’éducation de millions d’enfants laissés au pays avec un seul parent ou d’autres membres de la famille. Au Cambodge, ces enfants sont majoritairement des filles et ont un risque d’abandon scolaire plus élevé. Question de survie pour les pauvres, la migration saisonnière peut perturber l’éducation et exposer les enfants à un risque accru de travail des enfants comme à d’autres risques sur le lieu de travail. D’après une étude réalisée dans sept villes en Inde, environ 80 % des enfants de travailleurs migrants temporaires n’ont pas accès à l’éducation à proximité des lieux de travail, et 40 % travaillent et sont victimes d’abus et d’exploitation.

Le gouvernement indien a pris dernièrement des mesures en faveur de la scolarisation des enfants migrants en encourageant l’adoption de critères d’admission souples, en dispensant des services d’enseignement mobile et en améliorant la coordination entre les États d’origine et les États d’accueil, mais les difficultés de mise en œuvre sont multiples. Un programme pilote lancé dans l’État du Rajasthan en 2010–2011 sur des sites de briqueteries montre que l’absentéisme est endémique parmi les enseignants et les élèves en raison des mauvaises conditions d’enseignement et d’apprentissage et de la nécessité pour les élèves de travailler.

POUR LES ENFANTS EMPLOYÉS COMME DOMESTIQUES, LE RISQUE D’ÊTRE EXCLUS DE L’ÉDUCATION EST ÉLEVÉ

En 2012, environ 17,2 millions d’enfants âgés de 5 à 17 ans travaillaient au domicile d’un employeur comme domestique, avec ou sans rémunération. Les deux-tiers d’entre eux étaient des filles. À Lima, par exemple, travailler comme employée de maison est pour une jeune fille l’occasion de quitter sa campagne et de continuer ses études, mais, dans bien des cas,
sa charge de travail est telle qu’elle n’a plus le temps de suivre une scolarité.

Le placement des enfants dans une famille d’accueil est monnaie courante dans de nombreux pays africains. Près de 10 % des enfants sénégalais sont dans ce cas. Les garçons ont plus de chance d’être placés dans une famille qui valorise l’éducation et ils font dès lors de plus longues études que le reste de leur fratrie. Pour les files, en revanche, la probabilité d’être astreinte aux travaux domestiques dans la famille d’accueil est quatre fois plus élevée et, partant, leurs chances d’y être accueillies pour bénéficier d’un meilleur accès à l’éducation sont bien moindres.

 

En 2012, environ 17,2 millions d’enfants âgés de 5 à 17 ans travaillaient au domicile d’un employeur comme domestique, avec ou sans rémunération

LES BESOINS ÉDUCATIFS DES COMMUNAUTÉS NOMADES ET PASTORALES NE SONT PAS PRIS EN COMPTE

La mobilité étant une composante intrinsèque de la vie des communautés nomades et pastorales, il est essentiel de prendre en compte leurs besoins dans les programmes. Le taux de scolarisation dans ces communautés est en général faible et fluctue selon les saisons de sorte que les élèves peinent à acquérir la maîtrise de la lecture, de l’écriture et du calcul aussi rapidement que leurs camarades. En Mongolie, faute de financement suffisant, le système d’internat mis en place dans les soums pour accueillir les populations nomades a créé des disparités d’apprentissage entre les enfants nomades et les enfants sédentaires.

De nombreux pays qui comptent une population nomade ou pastorale importante se sont dotés de ministères, commissions ou conseils spécialisés, comme le ministère de l’Éducation des nomades au Soudan. Ils consacrent l’essentiel de leurs efforts à adapter l’éducation au rythme des saisons et aux modèles de mobilité, par exemple en créant des internats et des écoles itinérantes.

Dans le nord du Nigéria, les almajiri (élèves migrants recevant une formation islamique) sont traditionnellement des éleveurs nomades. Dans l’État de Kano, un programme destiné à quelque 700 enseignants traditionnels met l’accent sur les échanges avec la communauté et la participation au choix des enseignants chargés des disciplines autres que religieuses.

La création d’un réseau d’écoles que les élèves puissent fréquenter et quitter en tout lieu et à tout moment peut constituer une solution viable, mais elle nécessite des systèmes de suivi efficaces et performants. Dans plusieurs pays, comme le Kenya et la Somalie, les enseignants sont itinérants et se déplacent avec les populations nomades pour faire la classe aux enfants.

L’éducation des populations nomades doit reconnaître et valoriser leur mode de vie. Dispenser un enseignement professionnel axé sur le mode de vie nomade peut être particulièrement pertinent pour des communautés pastorales. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture œuvre depuis 2012 aux côtés des communautés nomades à l’implantation d’écoles de terrain agropastorales à Djibouti, en Éthiopie, au Kenya, en Ouganda et au Soudan du Sud. Ces écoles proposent des cours sur la rentabilité de la gestion du bétail et l’atténuation des effets du changement climatique.

DANS LES VILLES, LES GROUPES AUTOCHTONES PEINENT À PRÉSERVER LEUR IDENTITÉ

Dans de nombreuses régions, l’éducation des autochtones a pris la forme d’une assimilation forcée par le biais de l’école. S’y ajoutent la pauvreté et l’exode vers les villes qui s’accompagnent généralement d’une aggravation de l’érosion culturelle, de la perte linguistique et de la discrimination. La perte de la langue est un enjeu majeur pour les populations autochtones urbaines. En Équateur, au Mexique et au Pérou, les plus jeunes générations qui vivent en ville ont une probabilité moindre de parler la langue autochtone que celles qui vivent à la campagne.

Les cadres qui régissent les droits des peuples autochtones font peu référence à ceux d’entre eux qui habitent dans les centres urbains. Au Canada, 50 % des autochtones vivent en milieu urbain. Comme il ressort des analyses des populations autochtones urbaines, l’éducation joue un rôle important dans l’amélioration de leur qualité de vie et l’incorporation de programmes d’études et de pratiques culturellement adaptés se traduit par une amélioration des résultats de l’éducation de la petite enfance.

 

 


La migration complique la planification de l’éducation dans les villages et les villes

Dans les zones rurales dépeuplées, les planificateurs de l’éducation doivent trouver le juste équilibre entre une affectation rationnelle des ressources et le bien-être des communautés concernées, en particulier dans les pays à revenu élevé. Entre 1990 et 2015, la Finlande a fermé ou regroupé quelque 80 % d’établissements de moins de 50 élèves, soit plus de 1 600 au total. L’urbanisation et la baisse de la fécondité génèrent des difficultés très semblables dans de nombreux pays à revenu intermédiaire. En Fédération de Russie, le nombre d’écoles rurales est tombé de 45 000 en 2000 à moins de 26 000 en 2015. En Chine, le nombre d’écoles primaires rurales a baissé de 52 % entre 2000 et 2010.

Les gouvernements qui, par souci de de rentabilité, envisagent le regroupement d’établissements scolaires ne doivent pas négliger le rôle important de l’école comme vecteur de socialisation au sein d’une communauté, sans parler des autres retombées positives. L’analyse des données du Programme international pour le suivi des acquis des élèves 2015 (PISA) révèle que, dans les écoles de taille réduite, les problèmes de discipline, de retard et d’absentéisme des élèves sont moins fréquents.

Mener un regroupement d’établissements avec succès nécessite d’en examiner le coût et de consulter tous les intéressés. En Lituanie, le gouvernement a mis au point un ensemble de mesures prioritaires pour conserver les petites écoles primaires rurales et fourni des centaines de cars de transport scolaire neufs pour assurer l’acheminement des élèves en toute sécurité.

Plusieurs pays encouragent les écoles rurales à mutualiser leurs ressources et l’apprentissage afin d’entretenir leur dynamisme. Au Chili, 374 microcentres offrent aux enseignants  d’écoles rurales l’occasion de se réunir et de discuter des problèmes communs qu’ils rencontrent. Depuis 2011, le gouvernement chinois conduit un vaste programme de rénovation et de modernisation de petites structures scolaires en milieu rural, et des organisations non gouvernementales (ONG), des communautés locales et des écoles ont établi des réseaux de mise en commun de ressources.

L’ACCÈS À L’ÉDUCATION EST PLUS DIFFICILE POUR LES MIGRANTS QUI VIVENT DANS LES BIDONVILLES

Au moins 800 millions de personnes vivent dans des bidonvilles. Il est néanmoins probable que ces chiffres soient en-deçà de la réalité, du fait que les pays n’utilisent pas les mêmes définitions ou méthodes d’estimation. Les habitants de ces bidonvilles sont, en grande partie, des migrants d’origine rurale qui ont rejoint la ville et n’ont pas accès aux services de base, notamment à l’enseignement public. Dans ces zones où expulsions et réinstallations se succèdent, le taux d’abandon scolaire est élevé cependant que le taux de fréquentation scolaire est bas. En 2016, au Bangladesh, le taux de déscolarisation des adolescents en âge de suivre des études secondaires était deux fois plus élevé dans les bidonvilles que dans d’autres quartiers urbains.

La collecte de données sur l’éducation dans les bidonvilles n’est pas une priorité, car les débats sur l’urbanisme tournent principalement autour des problèmes de logement, d’approvisionnement en eau et d’assainissement. Le réseau Shack/Slum Dwellers International recueille des données dans plus de 30 pays, mais une petite partie d’entre elles seulement concernent l’éducation. L’activité éducative dans les bidonvilles risque d’être sous-estimée, à défaut de pouvoir comptabiliser les écoles privées non déclarées qui pallient l’absence d’écoles publiques. Dans le bidonville de Kibera, au Kenya, un projet de cartographie libre a permis de recenser 330 écoles, alors que leur nombre officiel était égal à 100. Les écoles privées sont souvent la seule possibilité dans les bidonvilles, mais la réglementation y est en général insuffisante et les enseignants n’ont aucune formation. Une initiative visant à accroître la qualité des enseignants des bidonvilles à Nairobi a amélioré le niveau de lecture, d’écriture et de calcul des élèves.

Il est primordial de faire de l’éducation dans les bidonvilles une priorité dans les débats sur l’urbanisation. Garantir le maintien et le respect des droits des habitants est une avancée majeure vers l’offre d’éducation, compte tenu de la réticence coutumière des gouvernements à investir dans des infrastructures éducatives destinées à des personnes qui se sont installées sur un terrain sans en être propriétaires. En Argentine, la délivrance de titres de propriété a été associée à une amélioration durable de l’éducation.

La plupart du temps, les règles en matière d’enregistrement et de documents à fournir sont tellement rigoureuses qu’elles freinent la participation des migrants à des programmes de protection sociale susceptibles de favoriser leur éducation. Dans les bidonvilles, au Kenya, il était impossible de s’inscrire au programme urbain de protection sociale sans produire un numéro d’identification national, excluant de facto les 5 % de bénéficiaires présélectionnés qui étaient réfugiés, incapables de prouver la nationalité kenyane ou issus de ménages dirigés par des enfants.

 

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