<
 
 
 
 
×
>
You are viewing an archived web page, collected at the request of United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization (UNESCO) using Archive-It. This page was captured on 11:50:14 Dec 22, 2021, and is part of the UNESCO collection. The information on this web page may be out of date. See All versions of this archived page.
Loading media information hide

Penser « infrastructure » et non « architecture » pour renforcer la solidarité et l’action mondiales dans le domaine de l'éducation

Noah W. Sobe — 17 juillet 2020

Le Laboratoire d’idées sur Les futurs de l’éducation a pour objet de mettre en valeur des articles originaux de recherche et d’opinion qui portent sur des questions examinées dans le cadre de l’initiative « Les futurs de l’éducation » de l’UNESCO. Les idées exprimées ici sont celles des autrices/auteurs ; elles ne sont pas nécessairement celles de l’UNESCO et n’engagent pas l’Organisation.

FR NWS - Quote Card 2 - Ideas LAB

Alors que le secteur de l'éducation s’attelle à se reconstruire et à se réinventer à la suite des perturbations dues à la COVID-19, il est essentiel de parler de solidarité et d’action mondiales. En parallèle aux stratégies locales et nationales novatrices, il est tout aussi important de se doter d’une stratégie mondiale novatrice. La communauté éducative internationale est-elle à la hauteur de cette tâche ? Comment faut-il mettre en place ce travail ?

La question des meilleures actions à entreprendre à l’échelle mondiale suscitait déjà bien des débats avant la pandémie actuelle. Dans un essai publié en 2019 dans l’International Journal of Education and Development, Nicholas Burnett soutenait que « l'architecture internationale pour l'éducation » était « défectueuse » et devait être réparée. En réponse, Steve Klees pointait vers une erreur de diagnostic du problème et indiquait qu’au lieu de réparations de fortune, c’était une transformation radicale des approches du développement qui était nécessaire. L'essai de Burnett appelait de ses vœux « une agence internationale unique chef de file pour l'éducation » ce qui, selon Richard Sack, était une réponse anachronique dans un monde où se multipliaient les acteurs et les priorités. Concrètement, à la fin de 2019, Julia Gillard, du Partenariat mondial pour l'éducation, a lancé un appel à la communauté éducative mondiale, lui demandant d’être mieux « en mesure d’avoir une pensée stratégique, une innovation, une planification, une prestation et une responsabilisation conjointes ». Stefania Giannini, de l'UNESCO, a également proposé que les progrès passent par une collaboration renforcée autour de priorités communes.

Dans sa réponse à la COVID-19, la communauté éducative internationale semble aller dans le sens des collaborations et des partenariats, et non des structures qui englobent et orientent. L'UNESCO a lancé une nouvelle Coalition mondiale pour l'éducation. La coopération entre les organes des Nations Unies et les autres partenaires se porte bien. Bon nombre de ces dispositifs sont de nature moins hiérarchique et plus horizontale dans leur orientation, même si cela ne signifie pas qu’ils n’aient pas eux aussi leurs limites. Il a été souligné, par exemple, que les modèles de « partenariat » peuvent occulter des déséquilibres des forces. De nombreux termes utilisés pour décrire ces approches semblent avoir perdu de leur adéquation. Par exemple, on peut dire que le concept de « réseau » est tellement galvaudé et chargé de sens différents qu’il nous faut un nouvel idiome pour penser l'action collective mondiale.

C'est ici que le concept d’infrastructure prouve son utilité (par exemple, tel qu’il est exposé dans un essai récent de Lauren Berlant). Si l'architecture, au moins sous sa forme de référence dans le débat sur la coordination internationale de l'éducation mentionné ci-dessus, a trait à des structures bien connues qui stabilisent et organisent, l’infrastructure est formée d’éléments de liaison, de voies d’intermédiation. L'infrastructure est relationnelle, c’est tout ce qui se trouve « entre » et qui nous relie les uns aux autres et à un monde en mouvement.

Les solutions techniques fondées sur la hiérarchie et le contrôle sont arrivées en bout de course. Nous devons nous focaliser sur des infrastructures qui permettent une union collective, une intelligence collective et une action collective. En pratique, elles pourraient prendre la forme de plates-formes, de partenariats, de réseaux ou de coalitions. Mais le fait est que l'infrastructure se définit par le mouvement et l’usage. Une perspective « infrastructure » nous oblige à réfléchir profondément à nos relations les uns avec les autres et avec le monde.

Au cours de ces derniers mois, les capacités d'action d'un virus de 125 nanomètres de diamètre ont révélé au grand jour à quel point les humains sont inextricablement liés entre eux, mais ont montré aussi les systèmes et les structures qui nous séparent et qui font que la pandémie a exacerbé les inégalités dans presque tous les secteurs. La COVID-19 nous oblige à réfléchir aux relations que nous devrions établir avec les autres êtres humains, mais aussi avec la planète et les nombreux êtres qui la peuplent. Ces questions éthiques, les plus concrètes qui soient, nous appellent à accepter les expériences complexes et partagées de l’union de la connaissance et de l'action. Tout en créant une solidarité mondiale dans le domaine de l'éducation, nous devons accepter le processus désordonné de la construction de liens au sein des infrastructures qui relient les personnes, les idées et l'action.

Au lieu de rechercher des architectures pour nous organiser,
nous devrions bâtir des infrastructures pour nous relier les uns aux autres

Penser en termes d’infrastructure offre en outre la possibilité de contribuer à renforcer les biens communs mondiaux. Si nous acceptons les communs en tant que concept d’action, ainsi que l’ont suggéré Berlant et d’autres, nous continuons de focaliser nos efforts sur la lutte ardue et nécessairement continue de création du monde, pour que nos actions collectives servent le bien de tous. Pour renforcer l'éducation et la connaissance – biens communs mondiaux – nous avons besoin d'une transparence de la collaboration, de la participation et de la gestion. Pour cela, au lieu de rechercher des architectures pour nous organiser, nous devrions bâtir des infrastructures pour nous relier les uns aux autres.

Noah W. Sobe est Responsable de projet senior du programme Recherche et prospective en éducation à l'UNESCO. Il a été président de la Comparative and International Education Society (CIES) et occupe un poste de Professeur d'études culturelles et éducatives à l'Université Loyola de Chicago. Cet article a été publié simultanément sur le blog NORRAG, le 17 juillet 2020. 

 

Citer cet article (format APA)
Sobe Webster, N. (17 juillet 2020) Penser en termes d’infrastructure et non d’architecture pour renforcer la solidarité et l'action mondiales dans le domaine de l'éducation. LABO Idées de l'UNESCO - Les Futurs de l'éducation. Repris à partir de https://fr.unesco.org/futuresofeducation/ideas-lab/sobe-penser-infrastructure-non-architecture

Citer cet article (format MLA)
Sobe, Noah W. « Penser en termes d’infrastructure et non d’architecture pour renforcer la solidarité et l'action mondiales dans le domaine de l'éducation ». LABO Idées de l'UNESCO - Les Futurs de l'éducation. 17 juillet 2020, https://fr.unesco.org/futuresofeducation/ideas-lab/sobe-penser-infrastructure-non-architecture

Contact

Siège de l'UNESCO

7 Place de Fontenoy
75007 Paris, France

Division Futur de l'apprentissage et Innovation

futuresofeducation@unesco.org

Suivez-nous