List the key activities that were carried out during this reporting period in order to achieve these expected results. Please describe the activities in detail and note their effectiveness or any problems encountered in implementing them.
Actions de transmission aux adultes (2016-2017)
Performances en situation
La relance et l’entretien du processus de la transmission du cantu in paghjella doivent donner la priorité aux pratiques coutumières, lors de performances in situ, réglées par un calendrier cultuel ou culturel. C’est là que les praticiens peuvent réellement recréer, dans un contexte contemporain, un savoir-faire qui ne peut plus admettre la forme du concert ou du disque. Des animations ont eu lieu dans la communauté corse de la diaspora (Marseille, Montpellier, Paris) et des veillées, dans les villages de Castagniccia.
Ateliers
« L’atelier de paghjella est une forme inventée. Elle n’existait pas auparavant et n’a jamais été nommée comme telle. Remettre en vigueur cette forme d’enseignement, par un renversement de valeurs remarquable, devient une forme de transmission moderne » (Marie Ferranti, Les Maîtres de chant, Gallimard, 2004) : cet extrait pose bien les fondations de l’esprit qui anime les ateliers. Quatre ateliers ont été accueillis dans des communautés villageoises, à Orezza, Casinca, Fiumorbu et Corte notamment. À la paghjella profane s’est ajouté le répertoire religieux : dans le Fiumorbu ; à Bastia (église Saint-Roch), où des jeunes gens voulant intégrer la confrérie Saint-Charles sont venus chaque semaine apprendre la messe ; à Folelli et à Corte, où une quinzaine de jeunes gens passionnés ont appris les messes.
Actions de transmission aux scolaires (2015-2017)
Dans l’académie de Corse, l’association Cantu in pagjella est intervenue dans des classes bilingues corse-français de quatre collèges (Camille-Borossi à Vico, Simon-Vinciguerra à Bastia, Henri-Tomasi à Folelli et Philippe-Prescetti à Cervioni) et deux lycées (Balagne à L’Île-Rousse et Laetizia-Bonaparte à Ajaccio), avec six chanteurs aguerris : Petru Guelfucci, Jean-François Giammarchi, Jean-Marc Bertrand, Jean-Luc Geronimi, Petru-Santu Guelfucci et Mathieu Maestrini.
Ces transmetteurs se sont adaptés à l’espace scolaire, qui n’est pas « naturel » à l’expression de la paghjella. On chante debout, mais dans une classe, on se tient ordinairement assis. On chante à trois : comment empêcher le reste du groupe de former une masse, attentive ou pas ? Enfin, le système scolaire est essentiellement fondé sur l’écrit, tandis que la paghjella se transmet exclusivement à l’oral. L’espace scolaire doit donc être apprivoisé et l’enseignement, être original, au sens propre du terme, puisque tout à fait nouveau, tenir compte de ces contraintes et trouver sa place.
La dialectique entre l’enseignant et les élèves suit plusieurs étapes :
- détermination des ateliers : le nombre est fixé selon le calendrier scolaire des différents établissements de l’Éducation nationale et adapté à la demande dans le cadre du privé. Le nombre d’élèves par atelier était variable (10 à 21 maximum), pour une équipe de trois transmetteurs.
- contenu pédagogique : établi selon le niveau des élèves, il débute chaque cours par une présentation de la polyphonie, des formes poétiques (paghjella, terzettu, madricale), des voix (a seconda, u bassu, a terza) et des termes (versu, garbu, sguilla, ricuccate…). Le texte en corse de la paghjella, écrit au tableau, avec une forme fixe de 6 vers octosyllabiques, est lu à haute voix par l’un des chanteurs, notamment pour situer l’accent tonique. Le cours se poursuit avec une séance d’écoute et de démonstration de 2 ou 3 versi (styles d’interprétation) de diverses régions. Les chanteurs interprètent la paghjella devant les élèves, puis celui qui entonne la seconda chante la ligne mélodique, sur laquelle vont venir s’accorder les autres voix. Tous les élèves chantent ensuite à l’unisson. Chaque élève reçoit un dossier personnalisé (nom des intervenants, date et heure, notes).
- mise en pratique : trois grands groupes d’élèves sont formés en fonction de leur tessiture et surtout du registre dans lequel l’élève va être capable de s’accomplir (basse, baryton, ténor, haute-contre). Une fois la ligne mélodique de leur registre respectif maîtrisée, les élèves sont répartis entre les trois voix (seconda, bassu, terza), pour appliquer ce qu’ils ont appris et faire résonner leur première paghjella. Les cours, en partie enregistrés à l’aide d’appareils numériques, sont adressés à chaque fin de séance, par courriel, aux élèves, parents ou enseignant.
L’évaluation de ces ateliers scolaires se heurte à certaines difficultés. Au stade du collège, s’agissant d’élèves âgés de 11 et 15 ans, leur voix n’a pas encore mué ; il est difficile de trouver des basses, qui sont assurées en règle générale par l’un des enseignants. Avec deux ans de plus, le registre de la basse serait beaucoup plus représenté. L’association Cantu in paghjella regrette donc que ces élèves formés ne soient plus suivis au lycée, où l’enseignement de la paghjella pourrait donner ses meilleurs fruits. Enfin, l’efficacité des ateliers délivrés pour ces élèves âgés de 10 à 15 ans aurait été supérieure s’ils avaient été sensibilisés en amont, dès le primaire, par les équipes pédagogiques.
Activités de recherche (2016-2017)
Créé en novembre 2016, le Conseil scientifique international (France, Espagne, Italie) compte quinze membres en 2017, dont Markus Römer, Bernard Lortat-Jacob, Marcel Pérès, Luc Charles-Dominique, président du CIRIEF, Jean-Jacques Casteret, directeur de l’Ethnopôle InÒc Aquitaine, Marie-Barbara Le Gonidec, co-responsable du programme de recherche iiAC/LAHIC, trois ethnomusicologues italiens, trois musicologues corses, ainsi que le responsable du fonds d’archives polyphoniques du Musée de la Corse. S’y ajoutent le collège des chanteurs pratiquants (quatre à six membres) et des spécialistes de langue et de culture corses.
La présidence en a été confiée à Françoise Graziani, professeur de littérature comparée à l’université de Corse Pasquale Paoli (UMR CNRS LISA 6240).
Son 1er symposium, tenu à l’université de Corse à Corte, le 28 juin 2017, sur le thème « Cantu in paghjella : le sens de la recherche », a posé les bases d’un dialogue interactif entre chercheurs en musicologie et interprètes et relancé la dynamique initiée par l’inscription sur la Liste de sauvegarde urgente. Les échanges avec les autres pays de pratique polyphonique doivent être encouragés, à la fois dans une approche comparative et pour mettre en évidence les particularités du cantu. La rencontre a accueilli huit interventions scientifiques, rythmées par les chants, sur le mode non programmé des pratiques sociales traditionnelles des paghjellaghji. Toutes les composantes et variantes dans la pratique de la paghjella étaient présentes parmi les contributeurs et les auditeurs : chanteurs aguerris et débutants, représentants de Sermanu et de Rusio, de Tagliu, d’Orezza, de Casinca, de Balagne et de la Conca d’Oru. Un enregistrement intégral, vidéo et audio, a été réalisé, en vue de sa publication en ligne sur le site Internet de l’association.
Fonds sonores collectés (2017)
Cinq messes ont été enregistrées in situ :
- deux messes des vivants et des morts de Sermanu et deux messes des vivants et des morts de Rusiu, toutes enregistrées en studio (Jean-Bernard Rongiconi, studios L’Aghjulina à Valle di Rustinu) ;
- une messe enregistrée en l’église de Tox, en mémoire de l’abbé Paul Filippi, dit Gregale, poète reconnu, cofondateur de l’ensemble vocal A manella.
Un ensemble de paghjelle profanes dans les divers versi connus ont été enregistrés à l’auberge A ghjuvellina de Pedigrisgiu, par Jean-Bernard Rongiconi.