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Problématique de la liberté d’expression et de la sécurité des journalistes : les magistrats de la Cour Suprême du Sénégal se concertent

29/04/2022
11 - Sustainable Cities and Communities
16 - Peace, Justice and Strong Institutions

L'UNESCO, en partenariat avec la Cour Suprême du Sénégal, a organisé du 25 au 27 avril 2022 un atelier d’échanges avec les acteurs du système judiciaire, pour renforcer leurs capacités dans l’usage des instruments judiciaires internationaux et régionaux pour garantir la liberté d’expression et la protection des journalistes.

Du 25 au 27 avril 2022, L'UNESCO a organisé à Dakar, un atelier d'échanges sur la jurisprudence internationale et africaine en matière de liberté d'expression et de sécurité des journalistes au profit des juges, procureurs, et magistrats de la Cour Suprême. Cet atelier, mené en partenariat avec la Cour Suprême du Sénégal, avait pour objectif de renforcer les capacités du système judiciaire et promouvoir leur rôle dans la garantie de la liberté d’expression et de la sécurité des journalistes.

Garantir la sécurité des journalistes reste un défi à travers le monde. En effet, selon l’Observatoire de l’UNESCO des journalistes assassinés, 195 journalistes ont été assassinés en Afrique entre 2000 et 2022, avec seulement 19 cas résolus. Pour cette même période, l’UNESCO a enregistré 26 cas en Afrique de l’Ouest parmi lesquels seuls quatre ont été résolus. Des chiffres qui, selon le premier président de la Cour Suprême M. Cheikh Ahmed Tidiane Coulibaly, interpellent, car « chaque journaliste tué ou neutralisé par la terreur est un observateur de la condition humaine en moins. Chaque attaque déforme la réalité en créant un climat de peur et d’autocensure », a-t-il déclaré lors de la cérémonie d’ouverture de l’atelier. Cette rencontre constitue donc pour lui, « une prise de conscience du rôle du système judiciaire dans la protection des libertés fondamentales, piliers de notre démocratie, parmi lesquelles la liberté d’expression ».

Pour une société ouverte et tolérante, le représentant du Directeur du bureau régional de l'UNESCO à Dakar, M. Michel Kenmoe, a réaffirmé « le rôle crucial que joue le système judiciaire dans la garantie de l’Etat de droit et la préservation des libertés individuelles […] et la nécessité d’une réflexion sur les mécanismes à mettre en place pour l’appropriation nationale de la jurisprudence internationale et régionale relative à la protection de la liberté d’expression et des journalistes ». D’après lui, cet l’atelier d’échanges entre acteurs et actrices du judiciaire participe à favoriser la promotion des bonnes pratiques dans le système judiciaire.

Les travaux de l’atelier ont permis tour à tour de faire un état des lieux de la liberté d’expression au Sénégal ; d’échanger sur la jurisprudence internationale, avec un focus sur la jurisprudence africaine, en matière de liberté d’expression ; d’engager la réflexion sur les mécanismes pour l’appropriation de cette jurisprudence ; et enfin de faire des études de cas pratiques pour la maîtrise des techniques d’application du triple-test.

Dans sa présentation sur la jurisprudence nationale en matière de liberté d’expression, le Directeur du Service de documentation et d’Etudes de la Cour Suprême, M. Oumar Gaye, a passé en revue d’une part les textes de lois qui protègent ce droit et d’autre part des exemples de jugements rendus par le Sénégal.

Animée par Mme Hélène Tigroudja, professeure de Droit international et experte au Comité des droits de l'Homme, les échanges ont également aidé les participants à reconsidérer la problématique de la protection des journalistes au niveau constitutionnel, au niveau de la réglementation de la profession, avec un accent particulier sur la sécurité des femmes journalistes et la cybersécurité. Les questions de dépénalisation de la diffamation et du délit de presse ont également été abordées. Afin de lutter contre l’impunité, Mme Hélène Tigroudja a mis en lumière les obligations positives des Etats en termes de protection contre la violence faites aux journalistes. « Les Etats doivent prévoir en droit interne une incrimination adéquate, et ont également une obligation d’enquête vis-à-vis des cas d’atteinte à la liberté d’expression », a-t-elle indiqué en exemple, en précisant que « le droit international laisse aux Etats leur souveraineté pénale certes, mais les obligations positives influencent leur politique pénale ».  

Au sortir de cet atelier, une série de recommandations, visant l’optimisation de l’usage, par les magistrats du Sénégal, des instruments judicaires nécessaires à la liberté d’expression et à la sécurité des journalistes, ont été formulés.

Cette formation de trois jours a été soutenue par le programme multi-donateurs sur la liberté d'expression et la sécurité des journalistes et le ministère des Affaires étrangères du Japon. La rencontre fait partie de l'Initiative de l'UNESCO pour les juges qui vise à renforcer les capacités des acteurs judiciaires à promouvoir la liberté d'expression et la sécurité des journalistes, tout en assurant la poursuite et le procès des responsables d'attaques contre des journalistes, ainsi qu’à empêcher plus largement des actions indiscriminées contre la liberté d'expression. Dans cette perspective, depuis 2013, l'Initiative des Juges de l'UNESCO a renforcé les capacités des acteurs judiciaires sur les normes internationales et régionales en matière de liberté d'expression, d'accès à l'information et de sécurité des journalistes dans plus de 150 pays à travers le monde. Plus de 23 000 acteurs judiciaires, dont des juges, des procureurs et des avocats, ont été formés à ces questions, notamment par le biais d'une série de cours en ligne ouverts et massifs (MOOC), de formations et d'ateliers sur le terrain, et de la publication de plusieurs manuels et lignes directrices.