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Le système judiciaire africain s’engage pour la sécurité des journalistes

Près de 100 participants se sont réunis à Arusha ce samedi pour participer au séminaire « Renforcer les systèmes judiciaires et les Cours africaines pour protéger la sécurité des journalistes et mettre fin à l’impunité », organisé par l’UNESCO et la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

Le séminaire a donné le coup d’envoi à une série d’activités et de réunions organisées au cours des six prochaines semaines en vue de la célébration de la Journée internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes.

Le Président sortant de la Cour, le juge Augustino S.L. Ramadhani, a ouvert les délibérations. Le juge avait assisté à un événement équivalent organisé en 2015 au Costa Rica par l’UNESCO, en association avec la Cour interaméricaine des droits de l’homme.

Il a déclaré : « Nous ne commémorons pas seulement la Journée internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes, mais nous célébrons également l’Année africaine des droits de l’homme, avec un accent particulier sur les droits de la femme, proclamée par l’Union africaine. »

« C’est également le dixième anniversaire de la Cour africaine, fondée en novembre 2006 » a-t-il ajouté.

Le juge a évoqué la jurisprudence de la Cour en matière de liberté d’expression en citant deux affaires. Dans l’affaire de Lohe Issa Konate contre le Burkina Faso, la Cour a statué qu’une peine d’emprisonnement pour diffamation était invalide et qu’une amende était une compensation suffisante.

La deuxième affaire concerne le meurtre du rédacteur Norbert Zongo et trois collègues en 1988. Selon le juge, la Cour a déclaré que le Burkina Faso « n’avait pas pris les mesures appropriées pour garantir le respect des droits des journalistes assassinés » et qu’« il n’avait pas fait preuve de diligence pour rechercher, enquêter, poursuivre et intenter un procès aux assassins ».

Guy Berger, Directeur de la Division pour la liberté d’expression et le développement des médias de l’UNESCO, et Sylvain Oré, Président de la Cour africaine. © UNESCO

Dans son discours de clôture, le Président nouvellement élu de la Cour, le juge Sylvain Oré, a déclaré qu’un plus grand engagement de tous les acteurs pourrait aider la Cour africaine et les cours nationales à mettre fin à l’impunité pour les attaques commises contre des journalistes.

Dans une réunion indépendante, il a montré un vif intérêt pour les activités de suivi du séminaire, comme le développement d’un cours de formation conçu pour renforcer les compétences des juges africains pour traiter les affaires de liberté d’expression en conformité avec les normes internationales et la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique.

Comme il est ressorti des discussions avec le vice-président Ben Kioko et le secrétaire général Robert Eno, la Cour et l’UNESCO envisagent de signer un mémorandum d’accord couvrant une série de coopérations.

Guy Berger, Directeur de la Division pour la liberté d’expression et le développement des médias de l’UNESCO, avait déclaré plus tôt que les Objectifs de développement durable avaient donné un nouvel élan à la question de la sécurité des journalistes et de la liberté de la presse, avec l’Objectif 16, cible 10 sur « l’accès public à l’information et les libertés fondamentales ».

Il a encouragé les cours à traiter en priorité les affaires concernant la liberté de la presse et la condamnation des coupables d’attaques contre des journalistes. Il a précisé que les dernières données de l’ONU sur le suivi judiciaire des meurtres de journalistes seront disponibles prochainement dans le rapport remis par la Directrice générale au conseil du Comité international pour le développement de la communication de l’UNESCO.

Mehdi Benchelah, spécialiste à l’UNESCO, a parlé du travail réalisé par l’organisation pour développer du matériel de formation destiné à plus de 3000 juges latino-américains et leurs assistants et a interrogé les participants sur les sujets prioritaires pour un cours conçu pour les participants africains.

Une séance du séminaire était destinée à encourager plus d’Etats africains à ratifier la déclaration pour étendre la portée géographique de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

L’UNESCO avait auparavant projeté une vidéo sur le sujet devant 42 journalistes d’une vingtaine de pays africains.

Pansy Tlakula, Président de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et rapporteur spécial de la Commission pour la liberté d’expression et d’information, a promis de renforcer le travail de la Cour, y compris dans le suivi de la mise en œuvre de ses décisions.

Mohamed Diawara, juge enquêteur en Guinée, a déclaré qu’il allait plaider pour que son pays rejoigne la Cour.

M. Abdirahman Omar Osman, Conseiller principal en médias et communications stratégiques du Gouvernement fédéral de la Somalie, a également déclaré lors du séminaire qu’il plaiderait pour que son pays ratifie le Protocole afin de rejoindre à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

Le programme comptait avec la participation du vice-président de la Cour de la CEDEAO, Micah Wilkins Wright, et de Joan Obiero du département juridique de l’Union africaine. Parmi les juges et fonctionnaires de la justice présents, il y avait des représentants du Madagascar, du Sénégal, de la Mauritanie, de la République démocratique du Congo, d’Algérie et de Guinée.

Des représentants de la société civile et de la justice participaient également au séminaire, en particulier des délégués de l’Union panafricaine des avocats, de Media Legal Defence Initiative, de PEN, de RSF, du Centre pour la liberté des médias et du Comité pour la protection des journalistes.

Le séminaire a pu être organisé grâce au soutien de l’Organisation internationale de la francophonie, IMS, Article 19, Open Society Foundations, GIZ et du ministère norvégien des Affaires étrangères.