Master Class UNESCO

Histoire

Comment éduquer à l’environnement ? Une première édition d’échanges pour les enseignants

Pour la première fois, les Campus UNESCO s’adressent aux professeurs sur un enjeu clé : comment éduquer les élèves à l’environnement. Cette Masterclass en ligne, a permis le dialogue entre 250 enseignants et cinq experts du sujet. Une discussion qui se poursuivra en classe grâce à un dossier de ressources pédagogiques conçu par ces derniers.

Seulement 19% des manuels scolaires de collège et lycée abordent la question de la biodiversté, d’après la dernière étude menée par l’UNESCO, c’est trop peu rapporté à l’urgence climatique. Face à l’engagement grandissant des jeunes en faveur de l’environnement et de leurs craintes pour l’avenir, les enseignants sont en première ligne pour les accompagner dans leurs réflexions. Pour pallier aux disparités d’accès aux ressources sur le sujet, l’UNESCO a organisé pour la première fois un Campus, sous forme de Masterclass.

Cinq experts, étaient réunis au service des besoins pédagogiques de 250 enseignants francophones de 32 pays différents : France, Gabon, Sénégal, Mali, Liban, Pérou, Qatar, Portugal, Burundi, Canada...

Un dossier de ressources pédagogiques constitué en collaboration par l’UNESCO et les experts a été partagé aux participants en amont de la Masterclass pour les aiguiller sur les thématiques abordées ; puis un second à l’issue des échanges, axé d’avantage sur les pratiques concrètes à mettre en place avec leurs élèves.

Pour ouvrir cette session, Simon Klein, écologue, docteur et médiateur scientifique à l'Office for Climate Education (OCE) a abordé l’écoanxiété. Puis la question des méthodes pédagogiques à mettre en place dans les écoles était développée par Margarita Abakoya Nass, Directrice éducation chez EIT Climate-KIC. Yacine Aït Kaci, Directeur artistique et stratégique à la Fondation ELYX, évoqua le thème de l’engagement de la jeunesse. Enfin Lotfi Ben Hamadi, Président de Wallah We Can, a mis en lumière des bonnes pratiques pour verdir les écoles. Vincent Berthe, Rédacteur en chef de So Good Radio, a conclu en donnant des clefs pour aider les jeunes à mieux s’informer.

En résumé
  • Pour mieux déceler l’éco anxiété, développer une écoute empathique des émotions des élèves. Par exemple, proposer des séances d’échanges sur leurs bonnes ou mauvaises nouvelles liées au climat qui engendrent à la fois des craintes mais aussi des prises d’actions.
  • Démocratiser la mise en place d’écodélégues dans toutes les classes puis les encourager à proposer des projets et les accompagner dans leur mise en place selon les moyens à disposition et la réalité des contraintes locales.  
  • Développer des projets pour rendre les écoles plus autosuffisantes, réduire leur impact environnemental et les transformer en lieux d’innovation et d’engagement. Ainsi, les jeunes peuvent être d’avantage acteurs du changement.
  • Multiplier les ateliers d’éducation aux médias dans les écoles pour permettre aux élèves de mieux comprendre comment fonctionnent les flux d’informations et leur donner accès à des sources fiables de qualité.

Reconnaître et tenter de limiter l’éco anxiété  

Aujourd’hui, environ 45% des 16-25 ans souffre d’éco anxiété. Cette angoisse se définit par une crainte anticipatoire sur les effets du changement climatique. Pour les enseignants, le principal problème souligné est : comment déceler cette crainte ? Simon Klein, écologue, relève que « la question émotionnelle est très peu traitée dans notre société », une des solutions serait tout d’abord d’ouvrir d’avantage la place à une écoute collective des émotions, bonnes ou mauvaises.

Doit-on craindre une généralisation du syndrome Greta Thumberg (si je puis me permettre) dans nos écoles ?
Missoum, enseignant à Blida, Algerie

En effet, les enseignants constatent parfois leur manque de connaissances face à des élèves à la littératie climatique grandissante. Selon l’écologue « l’engagement des jeunes qui est très inhérent à l’âge de l’adolescent », il faut d’avantage accueillir toutes les dimensions de motivation de ces élèves pour leur permettre de mettre en place des actions concrètes.

L’engagement de la jeunesse à l’école

Margarita Abakoya Nass est Directrice éducation chez EIT Climate-KIC, en charge d’un programme éducatif européen cross-sectoriel et cross-organisationnel, réunissant les acteurs académiques, de la recherche et de l’innovation. Selon elle, il est important de ramener les questions environnementales dans toutes les matières à l’école : « utiliser les mathématiques pour faire des prévisions climatiques, en géographie observer l’impact concret sur les territoires, etc ».

Des initiatives confirmées par Yacine Aït Kaci, selon qui l’Objectif du Développement Durable (ODD) le plus important est peut être la coopération : « les problématiques environnementales sont globales ». Il y a nécessité de dialoguer et de favoriser la transdisciplinarité entre les collègues et les enjeux. « Ça peut paraître contre intuitif de travailler les questions de genre ou de droits alors que tout est toujours lité à l’environnement », d’où l’intérêt selon lui des éco-délégués qui permettent des échanges plus horizontaux entre les matières. Ils permettent également d’étendre les actions au-delà du cadre scolaire, les jeunes étant les premiers prescripteurs de leurs parents.

Pourquoi faire des efforts alors que les gouvernements qui devraient mettre des restrictions plus sévères n'en font pas assez et que nos gestes n'ont pas autant d'impact qu'on le voudrait ?
Mylène, enseignante à Ottawa, Canada

Selon Yacine Aït Kaci, les gouvernances traditionnelles « sont dans l’urgence des problématiques donc il y a besoin de mouvements citoyens, d’organisations nouvelles, plus décentralisées pour ne pas oublier le pouvoir immense des citoyens ». Néanmoins, face à la diversité d’enseignants, de réalités et de cadre de vie partagés lors de cette Masterclass, il soulignait une réalité commune : « il y a un vrai déficit d’un imaginaire positif dans ce paysage d’actions contradictoires entre les citoyens et les gouvernements ».

Le développement des écoles plus vertes

Lotfi Ben Hamadi est Créateur et président de l'internat pilote Wallah We Can ayant avec pour objectif de rendre une école de 570 élèves dans le nord-ouest de la Tunisie, à Makthar, autonome en énergie et d'un point de vue alimentaire. Grâce à l’acquisition de 8 hectares de terrain près de l'internat sur lesquels les parents des élèves qui ne travaillent pas ont commencé à être formés pour produire les légumes et les fruits nécessaires à l'alimentation des élèves.

Comment votre projet peut servir à d’autres établissements ? Les élèves et acteurs de ce projet ont-ils pu transmettre leurs connaissances à des pairs ?
Sabrine, enseingnante à Lyon, France

Avec ce projet, il aspire à remettre sur les rails de la justice sociale en offrant aux élèves qui se sont appropriés leur établissement grâce à des connaissances environnementale, sur l’agriculture, l’autosuffisance... Un projet environnemental qui peut se transmettre sous divers modèles pour s'adapter aux réalités locales.

Favoriser l’éducation aux médias

« Il faut considérer un jeune dans l’actualité, comme une personne qui prend un épisode de série en cours », relève Vincent Berthe, Rédacteur en chef de So Good Radio. Selon ce journaliste, il est primordial de mieux consommer l’information. Aujourd’hui, nous sommes tous sur-sollicités et victimes « d’infobésité » à force de consommer des formats courts, souvent anxiogènes. L’importance de l’éducation aux médias dans les écoles est soulignée, pour permettre aux jeunes de comprendre les bonnes pratiques pour s’informer.

Du côté des journalistes, il soulève la nécessité de montrer la réalité scientifique et de laisser le public se faire son opinion, en multipliant ses sources médiatiques et en consultant les agences de vérification d’informations. Pour les élèves moins familiers des médias traditionnels, Vincent Berthe évoque également le contenu de citoyens, qui ne se prétendent pas journalistes mais, qui utilisent des codes plus adaptés au jeune public comme la plateforme Nowu ou les contenus des activistes Camille Etienne ou Johan Reboul.

Faut-il augmenter le nombre de radios locales, pour les jeunes, dans les langues qu'ils connaissent et adaptés aux problèmes environnementaux auxquels ils sont confrontés ?
Joseph, enseignant à Bandjoun, Cameroun

Oui, pour Vincent Berthe, « il y a besoin d’une incarnation locale avec un travail de terrain » pour permettre au public d’éviter la loi du mort-kilomètre : plus une information est physiquement lointaine, moins nous nous sentons concernés par celle-ci.

  • Cet événement a été réalisé avec le soutien de Tech4All et 6C Conseil
  • Découvrez les prochaines dates des Campus UNESCO : https://www.unesco.org/en/campus