À l'horizon
COVID-19 : un nouveau départ pour un multilatéralisme guidé par la culture ?
La fermeture massive des salles de concert, d'opéra, de théâtre, des librairies, des sites du patrimoine mondial et des musée aurait été impensable il y a quelques mois ». En s'adressant aux 130 ministres de la Culture à l'occasion de la réunion ministérielle exceptionnelle convoquée en ligne par l'UNESCO le 22 Avril 2020, Audrey Azoulay, Directrice générale de l'UNESCO, a souligné les bouleversements sans précédent que la pandémie a engendrés dans le secteur culturel. Le confinement à l'échelle mondiale a mis en lumière le rôle fondamental de la culture et de l'éducation pour traverser les périodes de crise. Confrontés à l'interruption soudaine de la vie économique et sociale et, face à un avenir très incertain, les populations, dans le monde entier, ont clairement exprimé leur besoin de culture, non seulement pour y trouver du réconfort ou un divertissement mais, de façon plus fondamentale, pour entrer en contact avec les autres et mieux appréhender un contexte mondial en constance évolution. En engageant des mesures d'envergure pour développer les contenus culturels en ligne, les gouvernements ont ainsi reconnu qu'assurer un accès équitable à la culture pour tous, y compris les populations les plus vulnérables, était une responsabilité essentielle des politiques publiques ainsi qu'un droit essentiel pour leurs citoyens. Souligner cette fonction essentielle de la culture dans nos sociétés et placer cette aspiration au cœur de l'agenda des politiques publiques, a été l'un des principaux impératifs de la crise actuelle.
Tout en mettant en évidence le rôle essentiel de la culture dans nos vies, la pandémie a aussi constitué un rappel à l'ordre en soulignant les failles préexistantes au sein du secteur culturel. Alors que des millions d'artistes et de professionnels de la culture ont été brusquement mis au chômage, la nécessité de consolider la sécurité sociale afin de construire un secteur culturel plus résilient et plus prospère, a été particulièrement mise en évidence. De nombreux lieux culturels et institutions sont aujourd'hui confrontés au risque d'une fermeture définitive. Le renouvellement de leurs modèles économiques, ainsi que leur pérennisation, apparaissent comme des priorités majeures. Les voyages internationaux ayant été temporairement suspendus, la dépendance du secteur culturel vis-à-vis de l'industrie du tourisme et la nécessité de forger des modèles touristiques plus inclusifs et plus durables se sont accentués. De même, bien que le passage accéléré à la digitalisation des contenus culturels ait mis en évidence les possibilités offertes par la révolution numérique - en matière d'accès comme d'innovation - il a aussi révélé de façon flagrante la réalité des inégalités sociales et de la fracture numérique.
L'ampleur des bouleversements appelle donc à repenser en profondeur les politiques culturelles, afin de forger un secteur culturel plus résilient, inclusif et durable. Les politiques culturelles devraient englober de manière plus systémique les défis contemporains liés au développement durable et tirer parti des nouvelles opportunités. Dans cette perspective, la nécessité pour les politiques culturelles de mettre à profit les possibilités offertes par la transformation numérique a révélé l'urgence d'élargir les contenus culturels numériques ainsi que d'assurer un large accès et une plus grande diversité de contenus culturels en ligne. L'enjeu principal est, en particulier, de répondre à une demande croissante, de concevoir des moyens novateurs afin de rapprocher les ressources culturelles des citoyens du monde entier et de s'appuyer sur le potentiel de la culture pour construire une éducation de qualité, afin d'offrir des contenus pertinents, adaptés à la diversité des contextes